25/04/2009
Le MFM est passé par là
« Nous sommes passé au stade d'action maintenant ! ». Au téléphone, en pleine conversation devant l'entrée du jardin d'Ambohijatovo, un militant d'une espèce en voie de disparition, le MFM, crache à haute voix son venin dans le cellulaire collé à l'oreille. En traversant la rue vers le coin des kiosques, on constate que les gargotes sont pleines à craquer. Il y en a au moins qui profitent du meeting quotidien d'Ambohijatovo. D'autant plus que l'argent y coule à flot, selon une tenancière. Dans une de ces échoppes, je surprends des employés du service public en train de vider des THB « Mahery » entre deux soupes chinoises. Ce sont généralement des gens que le vent de la « révolution orange » a balayé, ou balaiera, de leurs postes de commandement. J'en connais certains. Sur les bancs de l'école ou dans un bureau. On se salue amicalement. Une manifeste sur l'état de l'éducation nationale est en train d'être rédigée sur un ordinateur portable que personne ne maîtrise. On est loin de l'époque des tracts imprimés sur une ronéo. Des dazibao. On est loin des drapeaux rouges avec le black au bandeau, façon symbole corse. Mais les rouges et experts sont toujours là. Ils ont adopté les couleurs de Tiko mais demeurent des experts en manipulation de masse.
« La nomination de Manandafy Rakotonirina, comme Premier ministre, est une déclaration de guerre aux tenants de l'actuel régime transitoire », disait Constant Raveloson, un des derniers Mohicans restés fidèle au gourou du MFM. Un propos rapporté par « La Gazette de la Grande » dans son édition de samedi 18 avril. Selon son auteur, L. Denis Alexandre, cela « signifie que des innocents seront sacrifiés sur l'autel de la soif du pouvoir de certains de nos hommes politiques. N'est-ce pas Alain Andriamiseza, Satrobory et les autres animateurs d'Ambohijatovo qui ont crié, l'autre jour, que la lutte continue même « s'il y aura 1000, 2000, voire 3000 morts ». Tsiranana leur ont chanté le même refrain en '72 avec « tsak tsak zato arivo ». Manifestement, les chansons rétro sont à la mode.
Ainsi donc, « la nomination du leader MFM ne constitue que la première phase du plan pour le retour de Marc Ravalomanana ». La seconde étape sera de diviser l'armée pour rééditer la rébellion du Capsat en mars en faveur de Andry Rajoelina pour aboutir à la troisième phase : l'appel à une armée d'interposition, dirigée par la Sadc naturellement. En résumé, c'est l'opération « Guerre civile » en commençant par des guérillas urbaines. La stratégie est digne d'un Etat-major du temps des maquisards : provoquer les forces de l'ordre dont les ripostes provoqueront un effet boule de neige tout en scandalisant l'opinion en raison des éventuels dommages collatéraux.
Le résultat est là : des morts et plusieurs dizaines de blessés depuis le 20 avril. C'est un secret de Polichinelle : des militants d'Ambohijatovo sont armés. Diana Chamia en a vu qui ont fait explosé une voiture avec une grenade. Une certaine radio aurait d'ailleurs éructé une directive pour attaquer toutes les 4x4. Et dire qu'en janvier, l'ancien Pape du Socialisme tendance maoïste reconverti en chantre du libéralisme à outrance ( !), Manandafy, a dit urbi et orbi qu'en tant que membre de l'International Libéral, il refuse de prendre le pouvoir par la rue. Ironie du sort, il part à la conquête du pouvoir par la rue, où il a été nommé PM par la grâce d'une décision signée... à Tripoli. On n'arrête pas le progrès. Bientôt, l'ancien défenseur du prolétariat, Manandafy, fera un conseil de gouvernement par SMS depuis son bunker bourgeois, l'hôtel Carlton !
Le petit people du Net est émotionné par l'opération des militaires. Personnellement, je suis le premier à me lever pour dénoncer les tirs sur des civils. Et c'est justement pour cette raison que je me pose la question : où étiez tous ces gens il y a un mois et demi lorsqu'on a envoyé les militaires, les mêmes, pour tirer des balles réelles dans les quartiers, jusque devant ma porte, chaussés de Nike, comme maintenant, ou roulant à bord de 4x4, comme maintenant, armés jusqu'aux dents et causant autant de dommages collatéraux ? A l'époque, je n'ai pas enregistré autant de voix scandalisées par la chasse au "vahoaka tsy manan-tsiny". Pourquoi, à l'époque, l'Anawi n'a pas fait un ultimatum pour que s'arrête la chasse à l'homme dans les quartiers populaires ? Allons, Ladies and gentlemen, arrêtons la mauvaise foi. C'est parce que l'on s'est toujours bouché les oreilles et fermé les yeux au moment où il ne fallait pas que l'on entende ces grenades et que l'on voit ces morts d'aujourd'hui.
Car le mal est fait. Le MFM l'a fait. « Finalement, le MFM a réussi son coup, et c'est un coup de maître. Non pas de faire revenir l'ancien Président, mais celui de créer des troubles graves », note encore LGDI dans « Lundi noir pour la démocratie : Subversion, la guérilla urbaine et le MFM ». Encore une fois, à nous d'en tirer leçon. Si on veut bien réviser nos manuels. Ambohijatovo même est divisé. Raharinaivo Andrianantoandro s'est vu retiré le micro en voulant prêcher la modération. Ambroise Ravonison lui-même, celui qui a annoncé le vrai-faux retour de Ravalomanana, a été agressé physiquement par l'animateur Anja pour avoir voulu donner à ce dernier une leçon de non-violence. « Mandalo Ramaka dia may ny tanàna ». Là où Manandafy passe depuis 1972, l'herbe de la démocratie ne repousse plus.
15:35 Publié dans Politique | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : madagascar, manandafy, ravalomanana, politique, actualité, presse | Facebook
Commentaires
Bien écrit, mais :
Bien malheureusement, aucun sens de l'analyse, et aucun sens de la relativité.
L'auteur semble oublier que lorsque l'Emmonat était envoyé faire du maintient de l'ordre, c'est d'abord parce que les manifestations pro-TGV se terminaient trop souvent par des saccages ou des attaques.
Les Capsat, eux, tirent sur des manifestants, ou des innocents, qui n'avaient pas pour but d'attaquer ou de saccager.
Écrit par : critic | 27/04/2009
Pour compléter ce que dit critic, je dirais : Où est maintenant Odon Razanakolona qu'on entendait crier à tout va quand l'EMMONAT faisait ses opérations de maintien de l'ordre?
N'est ce pas lui qui dénonçait les tueries et autres exactions du temps où Ravalomanana était encore au pouvoir?
Tout irait-il pour le mieux en ce moment?
Écrit par : Eh ben | 29/04/2009
maintenant étêté, ce sera sans doute un p'tit tour et puis s'en va pour le mfm. Merci qui ?
Écrit par : Rondro | 30/04/2009
"Allons, Ladies and gentlemen, arrêtons la mauvaise foi", efa ho 100 taona aho no nivazavaza an'izany, bien avant le 7 février d'efa tsy nitsahatra niteny hoe tandremo, tandremo ny implosion ao ambadika ao, tandremo ny escalade de violence, tandremo sa lasa vono olona, ny hevitra no ampiadio...aleoko tsy miteny intsony sy miaiky fotsiny fa dp iray tanana isika.
p s: randouille, tu m'as envoyé ce livre en ligne, je n'ai pas pu le checker mais malheureusement, le site n'arrête pas de me rappeler tous les trois jours " c'est votre dernière chance, Mialy"... je suis tétanisée :)))
Écrit par : Mialy s'en fout | 01/05/2009
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