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18/11/2008

Triches et manipulations

L’histoire de toute société jusqu'à nos jours est une histoire de manipulations. Si certains essaient d’égarer l’opinion en posant des faux problèmes comme la primauté entre la poule et l’œuf (que l’on soit créationniste ou évolutionniste, bien sûr que c’est la poule), d’autres font carrément dans l’invention pour induire les gens en erreur pour des raisons que souvent l’histoire elle-même oublie. Quelques exemples qui nous sont proches.

Récupération : Andrianampoinimerina n’est pas Andrianampoinimerina

Andrianampoinimerina (1745-1828), c’est ce roi qui a su habilement unir le pays merina, à l’époque un réservoir d’esclaves vers les côtes, afin de contrebalancer la domination sakalava dont les princes squattaient aux portes d’Iarivo (Ambohidratrimo, Antsahadinta…) pendant des siècles. Tout le monde a déjà vu le portrait d’Andrianampoinimerina drapé dans un lamba blanc devant sa case en falafa (pardon, en bois), arborant une touffe rasta sur la nuque, un « felana » sur le front et la sagaie au vent. Et bien, ce portrait est un faux. Non, je déconne, le portrait n’est pas faux. C’est le fait qu’on dise que c’est le portrait d’Andrianamponimerina qui est faux. Tous les historiens le savent. Curieusement, on continue d’enseigner dans les écoles que c’est le portrait d’Andrianampoinimerina, lequel continue également d’être exposé dans les musées. Dans quel dessein ?

« Le Nampoina de notre enfance, drapé de lamba et brandissant une sagaie, tel qu'il est représenté sur un tableau heureusement sauvé de l'incendie du "rova", n'est pas Nampoina. En tout cas, il ne correspond pas à la description du roi laissée par Hugon, le seul témoin qui ait laissé des écrits de ses voyages en Imerina, en 1808. Selon des recherches, le tableau représente, en fait, un brave guerrier de la baie de St-Augustin. Surnommé Tom Brava par les Anglais qui fréquentaient alors l'endroit, il a été pris par erreur pour Andrianampoinimerina. Depuis, le tableau est entré dans l'histoire » ai-je écrit dans « L’Express de Madagascar » le 04 décembre 2002.

Manip pour manip, voici le dessin d’un leader de l'opposition dont le come back politique se fait en toute discrétion : Lahiniriko dans la peau du faux Nampoina. Après tout, le portrait est celui d’un gars du Sud, non ?

Andrianampoinimerina.jpg

Photoshop : Radama non plus…

L’histoire de Madagascar est une succession de lutte sanglante pour la prise de pouvoirs. Après quelques meurtres, par étouffements ou noyades, et des exils politiques, le fils de Nampoina, Radama I, lui succède sur le trône. Lui aussi, tout le monde connaît son portrait. Et bien, c’est également un faux. Ou plutôt à moitié. Car seul le visage y est authentique. Et encore : Radama I lui-même trouve que ce n’est pas ressemblant.

« J’ai commencé le portrait de Radama qui vient poser le matin lorsque les plaisirs de la nuit ne le retiennent pas trop au lit», écrivait celui qui est à l’origine du portrait, le Français Coppalle, en 1825. Pour montrer aux yeux des étrangers qu’il est « civilisé », Radama I s’est fait couper ses longs cheveux et s’est fait enlever les boucles d’oreilles qu’il portait comme tout « LavRadama_1er.gifasofina » qui se respecte. Fan de Napoléon, il a ordonné à Coppalle de lui faire porter l’uniforme d’un officier de l’Empire sur le portrait. Du photoshop artisanal. Lorsque l’artiste eut fini, le roi le congédia. Il estime que le dessin ne lui ressemble pas. Voici donc, ci-contre à droite, un Radama plus ressemblant, en costume traditionnel.

 

Démagogie : un Z qui cache un zéro

Ambohimalaza, situé à quelques kilomètres de Tana, est un village réputé par l’endogamie de ses habitants. Parmi ses ressortissants stars figurent mon ancien patron, l’homme d’affaires Edgard Razafindravahy, qui a racheté « L’Express de Madagascar » en 2003. Fuyant le régime Ravalomanana, il est actuellement installé à Maurice. Sur un site web parlant d’Ambohimalaza, j’étais assez surpris par ses connaissances en histoires. Il y parle d’Andriantompokoindrindra dont la lignée forme une noblesse jalouse de ses racines. J’aurais pu m’arrêter là si le concepteur du site ne s’est pas aventuré à une manipulation pure et simple, à laquelle s’ajoute une démagogie de bas étage.

Sur une pierre, la lettre Z de « tanindrazana » (pays des ancêtres) a été effacé pour on ne sambohimalaza-tsarovy-ny-tanindrana.jpgait quelle raison. Patine des temps ou volonté délibérée d’un Paoiste ? Toujours est-il que par cette magie, l’inscription « tsarovy ny tanindrazana » devint « tsarovy ny tanindrana », comme on peut très bien le voir sur la photo en haut à droite. Quoi qu’il en soit, ceci est à l’origine de cette inspiration parfaitement débile du concepteur du site : « l'ouvrier qui a confectionné ce couvercle de béton et gravé  "Tsarovy ny tanindrana"  n'oubliez pas les côtiers ne manquait pas d'humour quand on sait que la colline est un haut lieu historique pour les nobles de l'imerina et que la rivalité hauts plateaux et côtiers est encore trop souvent présente ».

Soit il est aveugle et n‘a pas vu l’effacement délibéré du Z, soit c’est lui-même qui l’a fait par un moyen ou un autre. Et dernière erreur : les géographes ne disent plus hauts plateaux, mais hautes terres, pour parler de l’Imerina, un pays de moutonnement de collines. Le plateau le plus proche se trouve dans le Tamponketsa. Sinon, il faut aller dans l’Ihorombe. Les braves guerriers, et accessoirement voleurs de zébus, bara sont les vrais « hauts plateaux ».

Fake: achtung ! ceci est un faux

Nous avons réservé le meilleur pour la faim, celle qui justifie les moyens. Fake signifie truquer. Avec les nouvelles technologies, c'est de plus en plus aisé. En voici un exemple, à titre purement illustratif, de la part d'un Paoiste anonyme. En 2002, au plus fort de la lutte finale entre Ravalomanana et l'ancien président Didier Ratsiraka (un duel à K.O. Corral dont Mugabe et Tsivangirai vont faire un remake), Ratsiraka a traité Ravalomanana, Arte en possède le documentaire que j'ai vu, de "nazi, un fasciste" (sic). Et foilà le trafail !

Marc Ravalomanana.jpg

Je viens de découvrir un intéressant site de fake, par ici

Ambohidrabiby : monstrueux

Enfin, dernière découverte, la photo ci-dessous prise par des étudiants en voyage d'études au "musée" d'Ambohidrabiby. Il représente des figures de rois et princes prédécesseurs d'Andrianampoinimerina. Si pour ce dernier, personne ne peut affirmer avec certitude comment il était, il est evidahoazy mazavamment que c'est impossible pour ceux qui ont vécu avant lui. Ceci est donc une pure invention de l'esprit. Une monstrueuse manipulation historique par excellence, propre à égarer les esprits. On ne peut nullement accepter de montrer ça au public.

Ambohidrabiby.JPG

Psst !

Dans les commentaires qui suivent, je répond à Pakysse qui m'a tagué sur "Pourquoi bloguer sur l'Afrique". Ma réponse est cité sur Rue89. Merci à Joan de l'avoir signalé.

Commentaires

tu es trop fort Randy,vraimenet un grand bravo pour ton imagination quoi. Tena manakasitraka fa tsara be ny zavatra tahaka izao e

Écrit par : pakysse | 19/11/2008

mba tsy ilay N voalohany @ taNindrazana aza no nofafany ! lasa hoe ry "taindrazanay malala" marina mafy !

Écrit par : Rajiosy | 19/11/2008

Chapo!
je te félicite pour tout ce que tu arrives à faire. Mais tu sais, toi qui arrives à fuiner partout, aurais-tu déjà apperçu la photo de Lalao Ravalo en Bikini, moi je l'ai vu une fois mais je l'ai pas retenu, c'était dans un blog que je ne retrouve plus.

Écrit par : Hilda | 25/11/2008

tena aleo aloa ianao tagena kely ra Randy an....Pourquoi bloguer sur l'Afrique? dia mazotoa homana aza aloa e.

Écrit par : pakysse | 26/11/2008

Pourquoi bloguer sur l'Afrique ? C'est tout simple : bloguer est un acte citoyen. Surtout en Afrique où les médias "classiques" ont un poids limité pour différentes raisons. Pour ne citer que quelques-unes, il y a la censure (officielle ou auto), la pauvreté qui fait que les journalistes sont facilement corruptibles, avec ce que cela suppose de "déviation" dans le traitement des infos, l'analphabetisme...
Oui, tout le monde ne peut avoir accès à Internet. Mais justement, bloguer permet d'interpeller l'élite éclairée, ceux qui ont les moyens, financier et/ou intellectuel, donc des leaders susceptibles de transmettre le message ou, tout simplement, de réfléchir dans un élan commun sur l'avenir de l'Afrique dont la raison fondamentale du non-développement est logée, en définitive et cela n'engage que moi, dans la matière grise.

Écrit par : Randy Donny | 26/11/2008

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