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22/04/2010

Heurs et malheurs économiques de la Transition

Madagascar.jpgVoici le dernier rapport de la Banque mondiale sur les 12 derniers mois. Je le publie ici en entier avec aucun commentaire pour permettre à chacun de former sa propre opinion.

Incertitude reste le maître mot  pour décrire où en est l’économie malgache aujourd’hui.

Globalement, les activités du secteur privé ont rebondi après l’effondrement qui avait été constaté lors des événements politiques du premier trimestre 2009 (manifestations, pillages, etc.). Toutefois, ce regain reste timide car les niveaux d’activités sont bien au-dessous de ceux observés avant la crise, comme l’indique le comportement de la consommation d’énergie, des exportations, et du crédit bancaire. Surtout, il est inégal tant à travers les secteurs que les régions.

Les zones urbaines sont plus touchées, ainsi que les secteurs tournés vers les marchés extérieurs (tourisme, textile) et ceux associés au financement public comme la construction. Les secteurs épargnés sont l’agriculture en raison de bonnes conditions climatiques, le secteur de l’alimentation car la demande pour ces produits est fortement inélastique et le commerce informel qui sert de « soupape de sécurité » pour ceux qui perdent leur emplois dans les secteurs formels.

Depuis le début de la crise, la politique budgétaire n’a pas toujours été stable, avec des engagements des dépenses plus prononcés en juillet 2009 et, surtout, pendant le dernier trimestre 2009. Lors de ce dernier épisode, les dépenses engagées ont largement dépassés le niveau des revenus domestiques, créant un écart de financement proche de 250 millions de dollars.

Pendant les trois premiers mois de l’année 2010, le Gouvernement a rencontré des difficultés à financer ces dépenses car le marché domestique des obligations n’a pas répondu entièrement aux offres successives et cela malgré une hausse de trois points des taux d’intérêts. Le recours à la Banque centrale est resté périlleux car il est immédiatement interprété comme inflationniste par les opérateurs financiers. Comme résultat, le Gouvernement est depuis revenu à une politique d’austérité en engageant que 11 % des dépenses entre janvier et mars 2010, payant les salaires des fonctionnaires et le service de la dette, mais en stoppant quasiment toutes les autres dépenses. Cela n’a pas empêché des retards de paiements qui étaient encore approximativement égaux à 20 millions de dollars à la fin mars, soit largement au-dessus des standards historiques.

Le comportement des marchés financiers a été volatile depuis le début de l’année 2010, reflétant les variations de la politique budgétaire, certaines interventions sur le marché des changes et les fluctuations sur les marchés internationaux. Après s’être déprécié jusqu’à mi février, le taux de change s’est légèrement apprécié tant par rapport à l’Euro qu’au dollar. Les taux d’intérêts domestiques ont augmenté suite à l’accroissement de la demande par le secteur public sur le marché obligataire (mais avec de fortes variations). En revanche, la politique monétaire a continué à être prudente avec une réduction de 3% de la masse monétaire.  Le taux d’inflation reste maitrisé à 7,7% sur une base annuelle.

Le climat généralisé d’incertitude ne doit pas surprendre au vue du manque de visibilité sur la sortie de la crise politique à Madagascar. Le Gouvernement peut néanmoins agir sur trois fronts pour chercher à rassurer les opérateurs économiques dans le court terme. Premièrement, il peut mieux jouer son rôle de pourvoyeur et convoyeur d’information économique –non seulement en la collectant mais aussi en la disséminant au public. Deuxièmement, il peut confirmer sa volonté de maintenir une politique budgétaire prudente (ce qui ne signifie pas inactive car il y a de la marge pour améliorer son efficience tant du côté des recettes que des dépenses). Enfin, il peut clarifier les règles du jeu par le respect de la légalité et de ses engagements contractuels ainsi que par une plus grande transparence dans ses décisions économiques qui semblent plus répondre à des intérêts particuliers qu’à la prise en compte du bien être national (barrières à l’ entrée, interventions sur les prix, manipulations du taux de change, avantages fiscaux, etc.) dans des secteurs stratégiques tels que la distribution alimentaires, l’ agro-business, le transport, le pétrole et la communication.

11/12/2009

2009 : une crise de l'élite

Pour commencer, une dernière : connaissez-vous la raison de l'extinction des dinosaures ? On les a retenus dans une réserve au Mozambique !

Il ne reste plus que quelques jours avant que ne 2009 rende son dernier souffle. Inutile de regarder en arrière pour constater que 2009 était pour Madagascar une "année spéciale crise". Comme des enfants, ces messieurs qui se disent nos dirigeants (passé, présent et futur) se sont accusés de tous les maux. "Ce n'est pas moi, c'est lui qui a commencé !", affirme l'un. "Non, c'est lui. Il ne veut pas rendre mon jouet. C'est lui le responsable", retorque l'autre. Ces guéguerres de récré comme dans une classe de Maternelles est illustratif du fait que la crise cyclique que traverse Madagascar depuis 1972 est avant tout une crise de l'élite.

Société civile démissionnaire, média incapable d'assurer correctement son rôle de 4è pouvoir, dirigeants qui se servent dans la caisse de l'Etat depuis 1960 - le plus gros hold-up du siècle, un nombre restreint de familles qui monopolise les deux mamelles de la République (finances et politiques)... Les "avara-pi" (intellos) sont finalement les principaux fossoyeurs de la démocratie à Madagascar. Surtout ne pas dire que la crise de 2009 est la cause de la pauvreté de Madagascara alors qu'elle n'en est qu'une conséquence. La principale raison se trouve dans nos pauvres têtes. Jacques Morisset.jpg

Une intéressante étude,"Pour que la terre tourne... aussi à Madagascar : vers un agenda de relance économique", soumis par Jacques Morrisset, économiste de la Banque mondiale, éclaire encore mieux sur les raisons du retard économique de Madagascar depuis l'indépendance. J'en publie en bas des extraits. La version complète est ici.

Depuis 1980, il n'y a que 7 pays en développement qui ont reporté une croissance de leur revenu par habitant moindre que Madagascar, et encore tous ces pays ont souffert de guerres (civiles et régionales) de longue durée.

Une simple comparaison avec l'Ile Maurice suffit à illustrer que l'écart du revenu par habitant entre ces deux pays est passé de 2,7 en 1980 à plus de 15 en 2008. L'écart se creuse également avec le reste de l'Afrique qui ne se caractérise pas non plus par son succès. Le déclin économique de Madagascar n'est donc pas un phénomène récent ; il s'est simplement précipité avec la crise politique qui a éclaté au début 2009.

Les causes du déclin économique malgaches sont donc à rechercher dans des facteurs et comportements structurels et pas seulement conjoncturels.

Au cours de ces dernières années, Madagascar a entrepris un certain nombre d'efforts sur ces deux canaux de la gouvernance. Cependant, ces efforts ont été incomplets, menant à une tension de plus en plus grande pour aboutir à la crise politique du début 2009, qui doit être interprétée avant tout comme une crise de gouvernance. En effet, les bailleurs de fonds avaient interrompu leur aide budgétaire en décembre 2008 à la lumière de la mauvaise utilisation des fonds publics et du non-respect des procédures budgétaire pour l'achat de l'avion présidentiel de 60 millions de dollars ainsi que des exonérations fiscales accordées aux entreprises du Président Ravolomanana. En fait, à la fin de l'année 2008, il était reporté que 4 malgaches sur 10 n'étaient pas satisfaits de la manière comment fonctionnait la démocratie dans leur pays (Enquête Afrobarometer, 2009)

La crise politique actuelle n'est pas indépendante des nombreux dérapages qui se sont accumulés en matière de gouvernance au cours de ces dernières années à Madagascar.

La prépondérance de l'Exécutif n'est pas un phénomène nouveau à Madagascar, mais il s'est accéléré au cours de ces dernières années à travers une série de mesures dont les plus visibles sont rappelées ci- dessous.

- Le budget de la Présidence s'est multiplié par 10 entre 2003 et 2008, passant de 10 milliards à 133 milliards d'Ariary. Cette hausse illustre non seulement le poids grandissant de la Présidence dans le budget mais aussi dans les prises de décisions économiques. Cet interventionnisme est devenu aussi apparent à travers le nombre de conseillers qui s'est multiplié au sein de la Présidence au détriment des circuits institutionnels de décision.

- Les conflits d'intérêt se sont aggravés au cours du temps, jusqu' à la suspension de l'appui budgétaire en décembre 2008 à cause du manque de transparence quant à l'achat de l'avion présidentiel avec les fonds publics et l'usage abusif d'exonérations fiscales pour les entreprises appartenant au Chef de l'Etat.

- La présence dans le cabinet et à la direction des agences de l'Etat du personnel dirigeant des sociétés privées appartenant au Chef de l'Etat.

- Le contrôle du pouvoir législatif par le parti présidentiel s'est accentué, jusqu'à que ce dernier détienne 82% des sièges de l'Assemblée nationale après les élections législatives de 2007. Cette mainmise faisait suite à la dissolution de l'Assemblée par décret en 2007 et à la modification controversée de la loi électorale qui a réduit l'importance des régions les plus peuplées et traditionnellement favorables à l'opposition dans les listes électorales.

- Le remplacement des provinces par les régions, qui s'inscrivait en principe dans un effort d'accélérer et de rationaliser les processus de décentralisation politique et budgétaire, mais qui a mené à une centralisation politique car les chefs de régions ont été directement choisis par le Chef de l'Etat.

La concentration du pouvoir politique et économique autour de la Présidence s'est trouvée exacerbée par le nombre limité de personnes et de familles qui composent l'élite ou l'aristocratie politique dans un pays comme Madagascar. Les réseaux sont existants, façonnant les relations entre les agences gouvernementales, entre le pouvoir exécutif et législatif, et entre le secteur public et privé. A titre d'exemple, il peut être montré qu'une dizaine de familles détiennent traditionnellement les postes les plus importants au sein de la Banque centrale, les banques commerciales et le Ministère des Finances. Une remarque néanmoins s'impose : la concentration du pouvoir autour du Président Ravolomanana s'est en partie faite au détriment de cette élite traditionnelle, politique et financière, qui s'est ainsi trouvée de plus en plus frustrée, provoquant une partie des réactions qui ont mené à la crise politique.

A terme, les inégalités économiques, surtout lorsque la concentration du pouvoir s'accentue de plus en plus et les systèmes de recours n'existent pas, conduisent aux ruptures brutales qui caractérisent la vie politique à Madagascar. Ces ruptures se manifestent parfois à travers des coups d'Etat, parfois la résistance civile. Dans tous les cas, elle précipite le pays dans une grave crise économique, avec une hausse de la pauvreté et de la vulnérabilité.

Mendiant.jpg

La crise tarde à trouver une issue car l'équipe de Andry Rajoelina est composée de mendiants et autres kleptocrates qui vivent, par le biais de la politique, au crochet des aides étrangères. Voilà pourquoi, au lieu de garder tout seul le ballon et foncer droit au but tout seul comme un grand, le gouvernement de la Transition a vite capitulé face aux exigeances des bailleurs de fonds pour un "retour à la constitutionnalité" (?) Jacques Morrisset explique cette promptitude à flatter la croupe des bailleurs de fonds et éviter ainsi de se faire botter le cul par une raison : les aides extérieures sont des "mannes" dans un désert de moralité ou chacun cherche à s'enrichir sur le dos de nos enfants, ceux qui vont rembourser les emprunts dans 50 ans.

L'aide étrangère est en partie perçue comme une « manne venue du ciel », à savoir que l'argent ne vient pas directement de la poche des contribuables ce qui affaiblit leur devoir de vigilance. Ce comportement est encore plus vrai lorsque l'aide prend la forme de dons. Dans ces conditions, les décideurs politiques ne sont pas seulement faiblement redevables par rapport à leurs constituants mais ils sont encore encouragés à limiter les flux d'information et à affaiblir les organes internes de contrôle. A nouveau, la faiblesse des systèmes d'information et de contrôles est manifeste à Madagascar ce qui donne un certain poids à cet argument.

Il peut aussi être argumenté que les bailleurs de fonds ont manqué à leur devoir de vigilance à Madagascar, notamment en matière de leur appui budgétaire.




20/04/2007

Les p'tits trous de Paul Wolfowitz

Voici la transcription partielle de la conférence de presse, donné le 12 avril 2007 à Washington D. C., par le président de la Banque Mondiale, Paul Wolfowitz, ancien numéro 2 du Pentagone. Il y donne sa version de l'affaire de népotisme qui met à mal sa place au sen de l'institution :la promotion et de l'augmentation de salaire anormales qu'il avait imposées, en 2005, en faveur d'une salariée de la Banque, Shaha Ali Riza, par ailleurs sa compagne. En outre, un autre scandale Riza vient d'éclater : bien que salariée de la Banque, sa compagne avait obtenu en 2003 une mission en Irak à la demande du Pentagone dont il était alors le numéro deux. Cette confusion des genres constitue une nouvelle violation des règles de la Banque. La Staff Association, le syndicat maison, a demandé sa démission. Le conseil d'administration est, sur le papier, majoritairement hostile à M. Wolfowitz, mais hésitent à demander sa tête. Les seuls qui semblent partisans de son maintien sont les administrateurs représentants les Etats-Unis, le Canada, le Japon et l'A. Quoi qu'il en soit, tout ceci assombrit l'image d'une institution qui veut promouvoir la lutte contre le corrpution et la bonne gouvernance dans ses actions.

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Photo : Décidémment, la bande à Bush sont des clowns. Des méchants clowns. En visitant une mosquée turque, le dimanche 28 janvier 2007, Paul Wolfowitz a montré des chaussettes trouées. Et dire que ce gars-là gagne 320 000 dollars par an ! 

Président Wolfowitz : Permettez-moi de commencer en disant simplement quelques mots sur le sujet qui, je le sais, est dans tous les esprits. Il y a deux ans, lorsque je suis arrivé à la Banque, j’ai soulevé la question d’un conflit d’intérêt potentiel et demandé à me faire récuser du dossier. J’ai porté la question devant le Comité d’éthique et, suite à des discussions approfondies que j’ai eues avec son Président, le Comité a émis l’avis qu’il convenait de promouvoir et de transférer Mme Shaha Riza.
J’ai entrepris en toute bonne foi d’appliquer cet avis tel que je le concevais, et ce de manière à prendre en charge le règlement d’un problème qui était à mon sens susceptible de faire du tort à l’institution. Avec le recul, j’aimerais m’être fié à mon instinct initial et m’être tenu à l'écart des négociations. J’ai fait une erreur, et je le regrette.
Mais permettez-moi aussi de demander un peu de compréhension. Non seulement cela constituait un douloureux dilemme personnel, mais j’ai dû y faire face alors que j’arrivais juste dans cette institution et que j’essayais d’avancer en territoire inconnu. La situation était exceptionnelle et sans précédent. Il s’agissait d’une réaffectation involontaire, et j’ai estimé qu’un risque juridique se posait si cela n’était pas réglé par consentement mutuel. J’assume l’entière responsabilité des détails de ce dossier. Je n’ai pas cherché à cacher ce que j’ai fait, ni rejeté la responsabilité sur qui que ce soit.
J’ai rencontré le Conseil ce matin, et je lui ai proposé qu’il établisse un mécanisme quelconque pour déterminer si l’accord conclu constituait une issue raisonnable. J’accepterai toute solution qu’il proposera (...)

Question : Bonjour. Fernando Supra Pinto de « TVGlobo », Brésil.Si le Conseil décide de vous décharger de vos fonctions, comment évaluerez-vous cet épisode de votre mandat à la Banque mondiale ?Président Wolfowitz : Les membres du Conseil délibèrent actuellement sur cette question, et je ne vais pas anticiper sur les délibérations en spéculant sur leurs conclusions.

Président Wolfowitz : Je vous ai donné mon avis sur la question, et je vous ai dit ce que je leur avais proposé, et nous allons devoir attendre de voir ce qu’ils ont à dire (...)                                                                                                                       

Question : Corbit Daily, de « Thompson Financial News ». Monsieur le président Wolfowitz, dans votre déclaration préliminaire, vous avez dit que vous demandiez à être jugé sur ce que vous faites maintenant. Je me demandais ce que vous aimeriez répondre à vos critiques selon lesquels vous êtes en train de faire de la Banque mondiale un outil du Gouvernement américain, et vous faites preuve de favoritisme en matière d’aide au développement.                 

Président Wolfowitz : Je n’ai encore vu aucune preuve de cela, franchement. Ce que je veux dire, c’est que nous agissons en matière d’aide au développement comme cela se faisait avant que je n’arrive ici. Les fonds de l’IDA sont attribués sur la base de son système d’allocation fondé sur les performances, dont certains diront peut-être qu’il est trop rigide, mais qui est un système très objectif. Nous ne faisons pas de favoritisme à l’égard de qui que ce soit. Nous essayons d’affecter des ressources là où elles font le plus de bien pour la réduction de la pauvreté, et nous essayons de les acheminer plus rapidement et en les assortissant de meilleurs dispositifs de sauvegarde.Je pense qu’il s’agit de renforcer l’accent qui a commencé, à vrai dire, à être mis du temps de mon prédécesseur sur le concept selon lequel la gouvernance et la corruption font partie intrinsèque du processus. Et, franchement, je pense que les États-Unis et les autres pays développés sont tenus de faire plus, et pas seulement de montrer du doigt les pays pauvres et de dire que la corruption est leur problème. Si ceux qui volent des avoirs à ces pays les placent dans des banques américaines, ou des banques européennes, ou ailleurs dans les pays développés, il appartient aux pays développés d’aider ces pays à recouvrer leurs avoirs. Enfin, et je pense avoir été très clair sur ce point, toute l’aide au développement que nous pouvons fournir et tout ce que font les pays eux-mêmes pour accroître la production auront des retombées bénéfiques bien moindres sur les pauvres s’ils n’ont pas d’endroits où vendre leurs produits. Et je pense que les subventions agricoles, en particulier aux États-Unis de même qu’en Europe et au Japon, sont un scandale — je l’ai dit. Je pense qu’elles profitent aux riches au détriment des pauvres, et cela n’est pas un point de vue américain : c’est mon point de vue à moi, en tant que responsable d’une institution dont la responsabilité majeure est à l’égard des pauvres.(…)

Question : Jose Esquivel du magazine « Proceso », Mexique.
Ma question a trait à la corruption. En tant que personne aux avant-postes du combat contre la corruption et le favoritisme, la question que je veux vous poser est la suivante : Quel va être votre conseil à l’intention du ministre mexicain des Finances, que vous connaissez très bien, et qui n’a pas dit précisément aux Mexicains et aux médias mexicains s’il va mener une enquête sur ses prédécesseurs, ou qui a été impliqué dans ce scandale durant son mandat, comme quoi il a favorisé beaucoup de personnes et beaucoup de gens proches de lui, surtout des parents proches de gens qui travaillaient à ses côtés. Quel sera votre conseil à l’intention des Mexicains — et beaucoup de gens dans les pays pauvres estiment que les dirigeants ne disent jamais rien quand le ministre des Finances est impliqué dans une enquête,et ce n’est pas juste. Que dites-vous au peuple mexicain ?

Président Wolfowitz : Je ne suis pas au courant de l’affaire que vous décrivez, et je ne peux donc pas faire de commentaire sur ses aspects détaillés. Ce que je pense, c’est qu’il y a un solide principe général : s’il y a un problème, traitez-le de manière transparente, révélez tout ce que vous savez, et déterminez quels sont les remèdes appropriés. Je crois qu’on peut vraiment dire avec certitude que la transparence est l’élément primordial, la priorité absolue, en l’occurrence, pour assurer une bonne gouvernance et lutter contre la corruption.

Question : J’ai deux questions : envisagez-vous d’une manière ou d’une autre de démissionner de votre poste ?
Et, deuxièmement, au sujet du Conseil qui délibère aujourd’hui : ses délibérations sont-elles axées sur votre renvoi, ou considère-t-il toute une série de solutions, et quelles sont ces solutions, s’il vous plaît ?

Président Wolfowitz : Comme je l’ai dit en réponse à la question précédente, je ne vais pas spéculer sur ce que va décider le Conseil. Je leur ai fait clairement savoir, et je vous ai fait clairement savoir, que j’ai essayé de déterminer ce qui était raisonnable dans des circonstances sans précédent et difficiles. Et s’ils arrivent à une quelconque conclusion établissant si oui ou non c’est raisonnable, je me rangerai aux solutions, quelles qu’elles soient, qui sont disponibles en l’occurrence.
Cela n’a constitué en aucune façon une tentative pour protéger un intérêt personnel. Ce que j’ai cherché à faire, c’était de résoudre un problème qui, à mon avis, présentait un risque réel pour l’institution, et ce que je regrette vraiment, c’est de ne pas avoir entrepris plus délibérément de me tenir à l’écart. Je tiens à le dire clairement : je n’ai jamais cherché de mon plein gré à être mêlé à cela.

Question : Simon Cox, du magazine « The Economist ».Avez-vous craint que Mme Riza n’intente un procès contre l’institution si elle n’était pas satisfaite de l’arrangement qu’elle obtiendrait ?

Président Wolfowitz : Pardon ?

Question : Vous avez mentionné le risque juridique posé à l’institution. Avez-vous craint que Mme Riza n’intente un procès contre la Banque mondiale si elle n’obtenait pas l’arrangement qui lui convenait ?

Président Wolfowitz : Je pense que ce serait pour moi spéculer et préjuger de ce qu’il appartient au Conseil de déterminer, ou d’établir un mécanisme pour déterminer. Mais quand on se trouve en territoire inconnu et qu’on impose une solution involontaire à des membres du personnel, il y a des risques. Cela ne fait absolument pas de doute : il y a des risques.

Question : Barry Wood, « Voice of America ».Monsieur Wolfowitz, est-ce que la Banque n’a pas cédé en Afrique l’initiative en matière de lutte contre le VIH/SIDA à la Fondation Gates ? Et comment voyez-vous l’impact de l’approche qui est celle de la Fondation Gates sur les opérations de la Banque ?

Président Wolfowitz : Vous savez, l’idée que nous avons cédé l’initiative à quelqu’un d’autre laisse penser en quelque sorte que nous sommes en concurrence avec Microsoft. Ce n’est pas le cas. Nous sommes engagés dans le même domaine d’activité, et le fait pour la Fondation Gates d’être en première ligne de la lutte contre le VIH/SIDA est quelque chose de merveilleux, et l’une des choses que cela tend à vouloir dire, c’est que les pays veulent voir la Banque répondre à certains des besoins auxquels ne répond pas la Fondation Gates. En fait, on a aussi sous les yeux des exemples de coopération à mon sens très fructueux, par exemple pour la lutte contre le paludisme. Nous menons certains efforts conjoints avec la Fondation Gates en Zambie.
Et cela renvoie au point concernant l’architecture de l’aide et au fait que ces nouveaux donateurs comblent actuellement des vides très importants, ce dont il y a lieu de se féliciter. Je pense qu’un des aspects très importants sur lesquels cette institution doit se concentrer lorsqu’il s’agit de santé, c’est celui consistant à soutenir les systèmes de santé globaux des pays. Vous savez, si on se concentre trop sur une seule maladie, on peut fournir énormément de médicaments contre le sida mais on n’aura peut-être pas le courant pour faire marcher les réfrigérateurs permettant de conserver ces médicaments, ou on n’aura peut-être pas les autres médicaments pour d’autres maladies, ceux qui maintiennent les gens en meilleure santé et, de ce fait, moins sujets aux maladies qui sont généralement la cause voisine de décès des suites du sida.
Donc, pour en revenir à votre question : non, je ne considère pas cela du tout comme un problème. Je le considère dans le contexte de ce problème d’architecture de l’aide, à savoir où devons-nous faire jouer notre avantage comparatif, et où devons-nous engager nos fonds.

Question : Scheherazade Daneshkhu, le « Financial Times ».Monsieur Wolfowitz, vous avez fait de la bonne gouvernance le thème phare de votre présidence à la Banque mondiale et, au vu de votre déclaration de ce matin, qu’avez-vous à dire à ceux qui disent que… qui ne vont pas voir là des fautes d’ordre personnel mais une sérieuse erreur de gouvernance d’entreprise ? Et, à cet égard, n’avez-vous pas le sentiment que, indépendamment de ce que décidera le Conseil, votre crédibilité et votre aptitude à vous acquitter de vos fonctions sont compromises ?

Président Wolfowitz : Voyons ce que le Conseil décide avant que je ne me prononce sur ce que le Conseil aura décidé, mais je peux vous dire quelque chose à propos de ce que j’ai fait moi-même. Je n’ai pas cherché de mon plein gré à être mêlé à cela. Je n’y ai pas été mêlé pour de quelconques raisons personnelles, mais plutôt pour régler quelque chose qui présentait à mes yeux un risque d’ordre institutionnel. Je n’ai rien caché de ce que j’ai fait et, comme je l’ai dit, je suis prêt à accepter toute solution que le Conseil entend proposer.

Question : Monsieur Wolfowitz, pourriez-vous dire quelque chose au sujet des plaintes émanant de membres du personnel de la Banque mondiale, de niveau cadre, qui disent que vous vous êtes trop abrité derrière un petit groupe de conseillers — le nom Robin Cleveland semble être énormément cité, et Suzanne Folsom parfois aussi —, et que vous n’avez pas consulté ou écouté l’avis des cadres chevronnés ?

Président Wolfowitz : Permettez-moi de dire, tout d’abord, qu’il y a un point que je peux accepter comme ayant une certaine validité, à savoir que je suis arrivé ici comme le ferait n’importe quel autre PDG, ayant besoin de gens que je connaissais déjà. J’en ai fait venir deux — parfois, c’est présenté comme si c’était une armée de transfuges de l’administration Bush —, à savoir Robin Cleveland et Kevin Kellems. Suzanne Folsom était déjà ici du temps de Monsieur Wolfensohn, et elle s’occupe d’une partie de cette institution de son côté. Elle ne fait en aucun cas partie de mes propres services.
Mais j’ai entendu les préoccupations exprimées par des membres du Conseil, des membres du personnel, selon lesquelles cela va bien au début, mais le rôle de mes deux conseillers a besoin d’être plus structuré. Et je suis de fait d’accord là-dessus, et je vais trouver un moyen de mieux les insérer dans la structure en place.
Cela étant dit, permettez-moi de dire aussi que je trouve cette critique un peu usée. Ce que je veux dire, c’est que j’ai fait venir un Néo-zélandais et un Salvadorien comme directeurs généraux, et que je ne connaissais ni l’un ni l’autre avant de venir ici. J’ai recruté à l’extérieur un directeur financier italien, un vice-président exécutif suédois pour la SFI, un premier vice-président jordanien pour les relations extérieures, que je ne connaissais pas avant, et une ancienne ministre des affaires étrangères espagnole comme conseiller juridique.Et encore, plus récemment, deux autres nominations dont je me félicite particulièrement : deux Africaines, l’ex-ministre de la Santé du Botswana et directrice générale adjointe de l’OMS, Joy Phumaphi, qui est notre nouveau vice-président pour le développement humain — une femme exceptionnelle —, et prochainement comme nouveau vice-président pour l’Afrique, la ministre de l’Éducation nigériane, Obiageli Ezekwesili.Et presque toutes ces personnes sont non seulement, bien évidemment, des gens qui ne viennent pas de l’administration Bush, mais en majorité des gens que je ne connaissais pas avant. Mais ce qui compte surtout pour moi, c’est que j’ai fait la connaissance d’énormément de membres formidables du personnel. J’ai recruté comme chef de mes services Leticia Obeng, qui est une cadre de la Banque originaire du Ghana ; son adjoint, Auguste Kwane, un autre employé fantastique de la Banque, est de la Côte d’Ivoire. Et je pourrais continuer encore longtemps. Ça commence à devenir un peu ennuyeux, mais ce que je trouve quelque peu surprenant, c’est que je puisse encore être entouré de ces deux personnes qui tiennent tous les autres gens à l’écart de moi : c’est tout simplement inexact. Mais j’accepte, comme je l’ai dit au début, l’observation comme quoi le moment est venu de mettre au clair la structure et les liens.

Question : Kathy Shockwood, « National Public Radio ».Y aura-t-il des changements, ou y a-t-il eu des changements, au niveau des politiques de la Banque en matière d’hygiène de la reproduction et de planning familial ?

Président Wolfowitz : Absolument pas. J’ai lu des rumeurs à ce sujet, et je tiens à être très clair. Notre politique n’a pas changé. Nous avons une nouvelle stratégie en matière de santé que nous allons présenter au Conseil et qui, je le crois, est très claire à ce sujet, et je tiens, personnellement, à ce que ce soit clair : je pense que l’hygiène de la reproduction est absolument cruciale pour ce qui, je n’ai eu de cesse de le répéter, est un élément essentiel de l’ordre du jour du développement, à savoir faire en sorte que les femmes puissent avoir une contribution égale à celle des hommes ; et que des femmes en bonne santé, des femmes qui se sont mariées à un âge raisonnable ou qui ont eu un nombre d’enfants raisonnable, des enfants qu’elles ont pu maintenir en bonne santé, non seulement prennent mieux soin de leurs filles mais prennent mieux soin de leurs garçons et apportent une meilleure contribution à la société dans son ensemble. C’est une question de développement. La politique de cette institution, je le pense, était très claire avant que je n’arrive ici, et elle restera très claire.

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