07/08/2008
Pourquoi le monde tremble face au réveil de la Chine
Censure, non respect des Droits de l'Homme, pollution... Les faces cachées de la Chine seront à la Une le temps des Jeux Olympiques. Tant mieux. Cela fera réflechir les adeptes de la pensée politique unique, deux systèmes économiques. Mais il faut simplement éviter de critiquer la Chine, comme on critique la mondialisation. L'essentiel est de comprendre et de composer avec. Le temps des rêves est fini avec la mort des idéologies. Sinon, on fera encore des détours inutiles de plusieurs années.
A l'occasion de l'ouverture des Jeux Olympiques donc, voici la Chine telle que l'on ne vous l'a peut-être pas encore dit, d'après un article de MFI.
(MFI) Les jeux Olympiques de Pékin seront l’occasion pour la Chine d’offrir une image de puissance et de modernité. Le développement économique de l’Empire du milieu est sans conteste impressionnant. Le pays est désormais la troisième économie mondiale. Mais les inégalités sont abyssales entre une côte Est très riche et des campagnes miséreuses. Les spécialistes redoutent l’explosion d’une bulle spéculative et immobilière. Pour certains, la pauvreté des campagnes sera un frein au développement. Jusqu’à présent, les faits ont donné tort à ceux qui prédisaient le pire pour Pékin.
La Chine est-elle désormais une superpuissance économique ?
L’Empire du milieu séduit autant qu’il effraie. Hier, il était considéré comme un vaste marché ouvert aux entrepreneurs audacieux, en quête d’une main d’œuvre travailleuse et bon marché. Aujourd’hui, il est vu comme un prédateur, dévoreur de matières premières, voleur d’emplois, responsable des délocalisations et de la hausse du prix du pétrole. Ce qui était un pays en pleine évolution redevient une dictature qui ne respecte même pas l’environnement.
Depuis qu’en 1978, feu le président Deng Xiaoping a fait le choix de « l’économie socialiste de marché », la Chine est devenue la troisième puissance économique mondiale (derrière les Etats-Unis et le Japon) avec un PIB de 3 280 milliards de dollars. « Simple retour à la normale », affirme-t-on à Pékin où l’on rappelle que la Chine a été la première puissance mondiale jusqu’en 1820 (elle représentait alors 30 % du PIB mondial), avant de rater la révolution industrielle et de sombrer dans la guerre de l’opium. Les préceptes maoïstes ont fait le reste.
Se donner le tournis avec les chiffres de l’économie chinoise est facile. Depuis trente ans, le taux de croissance est chaque année supérieur à 8 %. Il a encore été de 11,9 % en 2007, soit la cinquième année consécutive à deux chiffres. Le pays s’est transformé en un gigantesque chantier. Partout on construit des immeubles, des usines, des villes même. La Chine est le premier constructeur au monde d’autoroutes, de voies ferrées, de logements et de centrales électriques. C’est aussi le premier consommateur de ciment, de charbon et d’acier, et le 2e de pétrole. Le pays assure à lui seul 18 % de la croissance économique mondiale.
Loin des préceptes du Petit livre rouge, la consommation connaît une hausse vertigineuse. En ville, les grands magasins ne désemplissent pas, et l’image des nuées de bicyclettes a été remplacée par celle des encombrements automobiles. Grâce au développement économique, 300 millions de Chinois sont sortis de la pauvreté, et le niveau de vie moyen double tous les huit ans. En 1990, on comptait zéro carte de crédit dans le pays, 100 millions en 2001, 802 millions aujourd’hui. « Pendant longtemps, vivre à crédit était considéré comme honteux par les Chinois, qui avaient le culte de l’effort et de la parcimonie. Aujourd’hui, la consommation à crédit est tendance », souligne Jean-François Huchet, le directeur du Centre français d’études sur la Chine contemporaine.
« Allez à l’étranger », scandait Deng Xiaoping. Les entreprises chinoises l’ont compris : 8 000 d’entre elles sont présentes dans 160 pays. En 2006, les investissements chinois à l’étranger ont représenté 12,3 milliards de dollars, soit une hausse de 120 % par rapport à 2005 ; 35 % de ces investissements sont réalisés dans les hautes technologies. A l’instar de Lenovo qui a racheté la division PC d’IBM. Parallèlement, 72 milliards ont été investis en Chine en 2007 par des firmes étrangères, surtout asiatiques.
Mais dans un pays de 1,3 milliard d’habitant, le PIB/tête – 2 200 dollars officiellement – représente moins de 20 % de celui des Etats-Unis. C’est une première dans l’histoire de l’économie mondiale : un pays en développement s’est imposé comme une grande puissance.
Le miracle économique chinois est-il durable ?
La question divise les experts. A en croire l’économiste Albert Keidel, du Carnegie Endowment for International Peace : « La performance économique de la Chine n’est pas un phénomène passager. Elle dure depuis plus de vingt ans et n’a aucune raison de s’arrêter. L’économie chinoise aura dépassé celle des Etats-Unis vers 2035. » Un avis que partage Patrick Arthus, auteur de La Chine (Ed Puf) : « La Chine est plus stabilisante que dangereuse pour l’économie mondiale. C’est une économie qui se développe vite et n’a d’autres choix que d’aller de l’avant. La Chine va encore croître et surprendre ses critiques. » Jusqu’à présent, les faits ont donné tort aux Cassandre qui annoncent régulièrement un ralentissement de la croissance chinoise. Néanmoins, les contraintes sont de plus en plus fortes pour Pékin.
Comme la Corée du Sud avant elle, sa stratégie de développement repose sur des bas salaires pour exporter en masse, puis favoriser une consommation intérieure qui complète le moteur de l’exportation. La différence est que, si Séoul avait fermé ses portes aux investisseurs étrangers pour protéger les entreprises nationales, la Chine a largement ouvert sa grande muraille. Résultat : plus de la moitié des exportations du géant asiatique sont le fait d’entreprises étrangères. « Il faut distinguer les produits “made in China et les produits made by China », insiste l’économiste Johanna Melka, citée par Le Monde. En outre, l’Empire du milieu serait peu compétitif. C’est ce qu’explique Johanna Melka : « Certes, les salaires sont bas par rapport aux standards occidentaux, mais ils augmentent rapidement du fait de la pénurie de main d’œuvre. Surtout, la productivité est faible, l’administration très lourde, les salariés qualifiés peu nombreux, les infrastructures souvent obsolètes. Cela donne des coûts salariaux unitaires supérieurs à ceux de certains pays asiatiques ou sud-américains. » D’autres pointent le retard de la Chine dans la recherche et développement, son manque de marques reconnues mondialement. Ce ne serait que l’atelier du monde, pas son centre d’ingénierie. « On faisait la même critique au Japon dans les années 70, à la Corée dans les années 80. Aujourd’hui, leurs marques sont synonymes de qualité, même dans le secteur des hautes technologies », rétorque l’économiste et sinologue Roland Lew. Au demeurant, TLC et Lenovo sont des marques qui commencent à s’imposer. On trouve même des 4X4 chinois sur les routes européennes. Certes, il est de bon ton d’ironiser sur leur qualité médiocre. Mais dans dix ans ?
Quels sont les principaux risques auxquels est confrontée l’économie chinoise ?
C’est le modèle de développement chinois qui inquiète le plus les économistes. « Pékin est trop dépendant du reste du monde. 70 % de son PIB provient du commerce extérieur et des investissements. La consommation intérieure représente moins de 30 % du revenu national, contre 65 % dans les pays développés. Que l’on assiste à une récession mondiale, et la Chine va trembler sur ses bases », analyse Andy Xie, économiste à la banque Morgan Stanley.
Aujourd’hui, l’économie chinoise semble lancée dans une vertigineuse course en avant, comme si la machine s’était emballée : les entrepreneurs construisent toujours plus d’usines, de nouvelles boutiques s’ouvrent tous les jours, les promoteurs lancent chaque semaine de nouveaux programmes immobiliers. Mais si un jour, il n’y avait personne à l’autre bout de la chaîne pour acheter et consommer... Les autorités chinoises redoutent une possible surchauffe ; elles ont renchéri le crédit, freiné les émissions de liquidités et augmenté les taxes. Mais rien n’y fait. Le taux de croissance a encore été de 11,9 % en 2007 alors que Pékin tablait sur 8 %. « Le comportement du gouvernement chinois ressemble à celui d’un surfeur qui négocie la crête d’une vague. Il veut éviter une chute trop importante de la croissance, mais craint d’être emporté par la surchauffe et l’inflation », observe un économiste européen à Pékin.
La sécurité énergétique est l’un des principaux goulots d’étranglement. En la matière, les besoins sont supérieurs aux ressources. Le pays a beau importer des hydrocarbures et des matières premières du monde entier – quitte à s’entendre avec des Etats mis au banc de la communauté internationale – les coupures de courant sont quotidiennes, obligeant les usines à stopper leur production. En février dernier, une émeute s’est produite dans une station-service de la ville côtière de Ningbo. Des centaines de camionneurs et automobilistes attendaient depuis des heures de remplir leur réservoir, quand on leur a annoncé que les cuves étaient vides et ne seraient pas réapprovisionnées avant plusieurs jours.
Autre bombe à retardement : la bulle immobilière et spéculative. De luxueux complexes de bureaux et d’appartements sortent de terre toutes les semaines. Mais ils se vendent difficilement. Le soir, dans les nouvelles villes chinoises, nombre de ces tours restent plongées dans le noir, faute d’habitants. Idem pour la Bourse. Depuis septembre 2007, on compte 200 000 ouvertures par jour de comptes en action, et le pays affiche désormais 60 millions de petits porteurs. Après le jeu de go, celui de la spéculation boursière. Mais la Bourse fait des yo-yo qui pourraient ruiner des milliers de petits épargnants.
Dernière menace : l’inflation. Celle-ci a atteint 7,5 % en 2007 ; mais 18 % pour les produits alimentaires, qui représentent le tiers des dépenses des ménages chinois. Certains produits battent des records, comme l’huile de soja (+58 %) ou la viande de porc (+43 %). Additionnée à la corruption et aux inégalités sociales, cette inflation provoque la colère. Les autorités multiplient les contrôles contre les ententes illicites entre producteurs ou entre commerçants. Un contrôle des prix a été institué pour le lait et les céréales. Cela n’empêche pas des manifestations contre la vie chère d’éclater sporadiquement. En novembre dernier, dans un magasin Carrefour de Chongqing, une promotion sur l’huile de colza a viré à l’émeute, faisant trois morts parmi les clients. Le gouvernement chinois n’a pas oublié qu’en 1989, c’est la hausse des prix qui a initié le mouvement social qui a débouché sur les manifestations de la place Tianenmen.
Entre la flambée des prix alimentaires, les yo-yo de la Bourse, la multiplication des projets immobiliers, les investissements industriels sans fin, les autorités chinoises essaient d’éteindre tous les incendies potentiels. Mais dans un pays de 1,3 milliard d’habitants, elles ne peuvent pas tout contrôler.
Les inégalités sociales constituent-elles une menace sérieuse ?
Début juillet, un millier de travailleurs migrants ont attaqué, trois jours durant, le poste de police de la ville de Kanmen, au sud de Shanghaï. Objet de leur courroux : le licenciement de plusieurs ouvriers, et l’impossibilité de nombreux autres d’obtenir une carte de résident, impérative pour avoir droit à la sécurité sociale. Cet incident illustre le malaise social persistant des campagnes chinoises. Selon l’Ong Human Right Watch in China, il y aurait eu 87 000 manifestations de ce type en 2007. Les causes sont diverses : salaires impayés, confiscations de terres, fermetures de dispensaires, abus de pouvoir des autorités locales… A en croire l’économiste Johanna Melka : « La Chine est aujourd’hui le pays le plus inégalitaire du monde. Jamais depuis 1949 (année de l’arrivée au pouvoir de Mao, NDLR), les disparités de revenus n’ont été aussi grandes. »
Un rapport de la Conférence des Nations unies pour le commerce et le développement (Cnuced) estime pourtant que le modèle chinois a su trouver un bon équilibre entre libéralisme et interventionnisme. A contrario, les recettes libérales du FMI n’ont jamais permis à un pays de sortir du sous-développement. De même, la libéralisation de l’économie chinoise en 1978 aurait permis, selon la Banque mondiale, la plus forte baisse de pauvreté de l’Histoire, puisque 74 % des Chinois vivaient sous le seuil de pauvreté en 1981 et 15 % en 2004 : 300 millions de personnes ont ainsi échappé à la misère. Néanmoins, la différence de développement est abyssale entre la côte Est et le reste du pays. A Pékin, Shanghai ou Canton, les grandes marques occidentales alignent leurs boutiques, les enseignes sont clinquantes et les automobiles toujours plus nombreuses. Mais à 3 000 km de là, dans la province du Gansu, les routes des villages ne sont pas bitumées, les maisons n’ont pas l’électricité et aucun médecin n’est présent. L’envoyé spécial du Monde se rappelle un paysan qui ne buvait que de l’eau chaude sucrée car le thé – pourtant boisson nationale – était trop cher. Les statistiques confirment ces images. Le revenu moyen des paysans est trois fois inférieur à celui des citadins. Pire : dans les grandes villes, le revenu par habitant est comparable à celui de l’Union européenne, alors que dans les régions les plus pauvres, il est au niveau de la Namibie. On est loin de la « société harmonieuse » prônée par le Premier ministre Wen Jiabao. « Non seulement les paysans chinois ne profitent pas de la croissance économique, mais ils en souffrent puisque leurs terres leur sont confisquées afin de construire des usines », ajoute Johanna Melka. Ils sont également victimes des atteintes à l’environnement du fait de l’industrialisation (voir article ci-après).
La Chine comptait un milliardaire (en dollars) en 2003, 15 en 2005 et 106 en 2007. La presse aime à dresser le portrait de ces tycoons qui roulent en Jaguar, habitent une réplique du château de Versailles et voyagent en jet privé. On parle moins des 200 millions de travailleurs migrants, les mingong : des paysans pauvres de provinces défavorisées qui tentent leur chance en ville, travaillant 18 heures par jour, 7 jours sur 7, logés collectivement dans des taudis, payés une misère, ne disposant pas de permis de résidence – le houkou – qui leur permettrait d’inscrire leurs enfants à l’école et de bénéficier d’une couverture médicale.
« Les Chinois ne souffrent pas de l’absence de liberté politique au sens où vous l’entendez en Europe, avec des partis divers, une presse libre, puisqu’ils n’ont jamais connu cette situation. Par contre, ils n’admettent pas les inégalités sociales criantes, les abus des hiérarques locaux du Parti communiste, la corruption croissante, l’impossibilité de se faire soigner ou d’inscrire leurs enfants à l’école, quand certains de leurs compatriotes vivent comme des nababs. La nouveauté est qu’aujourd’hui, ils osent manifester », souligne, dans Libération, le sociologue hongkongais Chen Xiwen.
Conscient du problème, le gouvernement chinois a adopté, en 2006, un plan de développement des campagnes qui met l’accent sur l’amélioration des infrastructures, la mise en place d’un système d’assurance sociale, la valorisation des terres. Mais ses effets tardent à se faire sentir. Selon l’économiste Andy Xie : « Alors que son taux de croissance dépasse 10% chaque année, la Chine n’affecte que 1,6% du PIB au soutien des campagnes. La priorité est là désormais car l’explosion des inégalités fragilise la poursuite du développement. »
Attaqué sur sa droite par ceux qui critiquent son libéralisme et sur sa gauche par ceux qui réclament une accélération des réformes, le Parti communiste chinois sait qu’aujourd’hui sa légitimité est l’enrichissement de la population. Celle-ci ne doit donc surtout pas connaître un coup d’arrêt.
Jean Piel
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31/07/2008
Quelques vérités sur le développement de Madagascar
Vive les vacances ! Aujourd’hui 31 juillet marque la fin de l’année académique 2007-2008 pour l’ESSVA, l’université catholique d’Antsirabe où j’enseigne le journalisme et l’histoire. Cette fin d’année marque également ma première année au sein de l’établissement en tant que Responsable de la filière Communication. En acceptant le poste, j’avais une petite liste de projets à réaliser. Je ne suis pas peu fier de mon bilan avec, entre autres, la publication du premier journal de l’école, « Excelsior », et un voyage d’études à Nosy-Be pendant le festival Donia. Depuis mon arrivée, une dizaine de journalistes sont passés à l’Essva pour des rencontres professionnelles avec les étudiants…
Sur mon initiative également, le « think tank » Club Développement et Éthique (CDE) a donné une conférence sur le thème de la Décentralisation, le 13 juin 2008. Le député Bernard Ravelonjato et l’adjoint au maire de Tana, Serge Radert, ont fait chacun une brillante intervention. Mais il y avait également Serge Zafimahova, ancien conseiller à la Présidence, dont je publie ici un large extrait de la communication : «les régions malgaches face aux enjeux de la mondialisation et de l’intégration régionale : de la réflexion intellectuelle à la mise en œuvre ». C’est un document de réflexion qui mérite que l’on s’attarde, au-delà des divergences d’opinion. Moi-même, je ne suis pas du même courant politique que les intervenants. Pour ceux qui veulent avoir la version intégrale, il suffit de me faire signe.
(…) Sans jamais avoir été en guerre, l’économie malgache a les caractéristiques d’un État en conflit permanent. Cette situation s’explique par les crises de pouvoir frappant le pays de manière cyclique. Les alternances procèdent pour l’essentiel d’actes extraconstitutionnels (1972, 1975, 1991, 1996, 2002). Elles se font généralement sous la pression de circonstances exceptionnelles à son essence et donnent lieu à des improvisations, à des tâtonnements et à tout recommencer une fois la nouvelle équipe aux affaires. La continuité de l’État est remise en cause à chaque changement de régime.
Parallèlement les déséquilibres régionaux se renforcent. La décentralisation prônée par les gouvernements successifs n’a pas encore réussi à corriger les inégalités, faute de réelle volonté politique du pouvoir central. Par exemple en 2007 ou en 2008, le total du budget alloué aux collectivités territoriales décentralisées (CTD) ne représente même pas 7% du budget national, sans compter le flou artistique concernant les textes régissant les régions.
Les effets de l’effacement de la dette sont loin de se faire ressentir au niveau du panier de la ménagère. En effet, si en décembre 2002 l’équivalent du SMIG permettait d’avoir 2 sacs de riz de 50 kg soit 100 kg (déjà très bas), en décembre 2007 le SMIG ne permettait plus que d’avoir moins de 35 kg de riz.
Du fait de l’adhésion de Madagascar à l’iPPTE, l’État est sous la tutelle des institutions financières de Bretton Woods et, ne possède aucune marge de manœuvre de négociations financières pour accéder à de nouveaux prêts, sans l’aval de ces dernières. L’État est considéré insolvable, aussi, la réputation de la signature de l’État malgache, sur la place financière internationale, est quasi nulle pour des résultats à évaluer très sérieusement en toute indépendance. De ce fait sauf à anticiper le remboursement de la dette extérieure, il est quasi impossible pour l’État de lever des fonds sur le marché financier international à l’exemple des Fonds souverains de pays comme la Chine, Singapour, le Koweït, Abu Dhabi, Qatar,... encore moins auprès des institutions financières internationales comme Merryl Lynch, JP Morgan ou BNP Paribas.
A l’aune de ce qui est dit plus haut, l’échec de la « table ronde » sur le MAP (Madagascar Action Plan) les 09 et 10 Juin 2008 était prévisible. L’Exécutif malgache a essayé de négocier un financement supplémentaire de 5 milliards $Us mais les nouveaux engagements fermes des bailleurs de fonds sont largement en dessous de 150 millions $Us soit moins de 0,5% du montant souhaité à l’issue de la réunion de juin.
BUDGET PREVISIONNEL - MADAGASCAR ACTION PLAN (MAP) | |||
Engagement (millions de $Us) | Coût | Acquis | A rechercher |
Gouvernance responsable | 806,5 | 218,94 (27%) | 587,56 |
Infrastructure reliée | 3276,64 | 2027,10 (62%) | 1249,54 |
Transformation de l’éducation | 1340,10 | 769,21 (57%) | 570,90 |
Développement rural | 1578,17 | 626,5 (40%) | 960,68 |
Santé, planning familial et lutte contre le VIH/Sida | 982,62 | 531,57 (54%) | 451,06 |
Economie à forte croissance | 653,36 | 39,30 (06%) | 614,06 |
Environnement | 347,74 | 22,51 (06%) | 305,23 |
Solidarité nationale | 208,72 | 15,77 (08%) | 192,95 |
TOTAL GENERAL | 9182,84 | 4250,89 (46%) | 4931,96 (54%) |
Sources : « Enjeux stratégiques du développement de Madagascar » par le Ministre de l’Economie, du Commerce et de l’Industrie – Table ronde des partenaires du développement de Madagascar 09/10 Juin 2008 (Cf. Express de Madagascar du 11 Juin 2008 p. 5)
Sur les 4250,89 millions $Us acquis, les 3717,70 millions $Us proviennent des Bailleurs de fonds et les 533,19 millions $Us se trouvent être la contrepartie malgache.
Serge Zafimahova, Président du CDE.
De g. à d., Bernard Ravelonjato, Serge Radert et, à l'ext. d., Serge Zafimahova, lors de la conférence du 13 juin 2008 à l'Essva.
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02/07/2008
Lakshmi Mittal, l'un des hommes les plus riches du monde, bientôt à Madagascar ?
D'après l'édition de lundi du quotidien britannique "Financial Times", le géant du fer et de l'acier Arcelor Mittal souhaite acquérir des parts de Rio Tinto.
Rio Tinto est déjà convoitée par un autre géant du fer, BHP Billiton.
Selon le quotidien londonien, le président-directeur général de l'entreprise, Lakshmi Mittal, pourrait prendre une participation dans Rio Tinto en rachetant les parts d'actionnaires existants.
M. Mittal pourrait également attendre que l'offre actuelle de BHP Billiton sur Rio Tinto soit amorcée pour faire intervenir les autorités de la concurrence.
Toujours selon le quotidien londonien, la création d'un géant du minerai de fer quasi monopolistique forcerait BHP Billiton à se séparer d'une partie de ses actifs et à les vendre à bon prix à Arcelor Mittal.
Rio Tinto a acheté le géant canadien de l'aluminium Alcan en 2007.http://www.radio-canada.ca/regions/est-quebec/2008/07/01/005-arcelor_mittal.asp?ref=rss
Si l'on en croit ce communiqué, le Andrew Carnegie indien, Lakshmi Mittal, aura donc bientôt un pied à Madagascar. Du moins, s’il réussit son dernier exploit : racheter des parts de Rio Tinto. Ce dernier, on le sait, exploite l’ilménite de Fort-Dauphin à travers l’entreprise QMM dont il détient 80% des actions. Il s’agit du 2ème plus grand projet minier à Madagascar avec l’exploitation du nickel d’Ambatovy par Dynatec-Sheritt. Lakshmi Mittal est, en fait, un citoyen britannique. Il a quitté l’Inde il y a 30 ans. Depuis, du village sans électricité de Sadulpur (Rajasthan), où il a vu le jour le 15 juin 1950, au Kensington Palace Gardens, où il a acheté une imposante maison pour 120 millions $, il a pris le temps de devenir la 3è fortune mondiale avec 25 milliards $, derrière William « Bill » Henry Gates III et Warren Buffet. En 1988, en rachetant une aciérie à Chicago (Ispat Inland), il développe sa stratégie : réduire drastiquement les coûts en rognant sur les pensions versées aux conjoints de salariés décédés.
Avec 310 000 employés répartis dans plus de 60 pays, son groupe en enregistré un chiffre d'affaires combiné de 105,2 milliards de dollars US, pour une production de 116 millions de tonnes d’acier brut, soit environ 10 pour cent de la production mondiale d'acier, en 2007.
Dans l'hindouisme, Lakshmi (ou Mahalakshmi) est la déesse de la fortune et de la prospérité. Ceci explique-t-il cela ?
Pour ceux que cela intéresse :
ArcelorMittal - Relations Investisseurs
Europe +352 4792 2414
Amériques +1 312 899 3569
Investisseurs individuels +352 4792 2434
SRI +44 203 214 2854
Obligataires / Entités de crédit +33 1 71 92 10 26
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22/06/2007
Les hauts et les bas de l'ariary à travers l'histoire
La banquière : "quel est le montant de votre chèque ?". La cliente, vraisemblablement une ouvrière des zones franches : "400.000". La banquière : "Vous avez bien lu, au moins, votre chèque ?". La cliente : "Oui, c'est 400.000". La banquière, excédé : "Regardez, c'est 400.000 ?". Sur le chèque, il est écrit 80.000. En fait, c'est kif-kif. 400.000 Fmg équivaut à 80.000 ariary. Sauf que, deux ans après l'adoption officielle de l'ariary, la cliente est toujours incapable de compter autrement qu'en Fmg. La scène, authentique, s'est passé dans une banque d'Ankorondrano. J'y ai assisté, tout en grommelant quelques noms d'oiseaux à l'endroit de la banquière car non seulement, moi aussi, je suis incapable de compter en ariary, mais aussi parce qu'elle doit respect aux clients que je sache. Oui, je continue à dire que le basculement vers l'ariary est une des décisions les plus stupides que l'on ait pris ces derniers temps car non fondée sur une véritable nécessité économique. C'est ce qui m'a déjà amené à écrire ce dossier en 2005. Le texte circule beaucoup sur le net. Autant que je le reproduise ici aussi.
Nos ancêtres les Vazimba pratiquaient le troc comme unique système d'échanges. L'introduction de la monnaie est généralement située vers le Xè siècle. Elle était le fait des Arabes qui commerçaient sur les côtes nord-est et nord-ouest et qui apportaient avec eux des dinars d'or fatimites. Certains de ces dinars ont été retrouvés dans des sépultures, tel à Vohémar. D'usage encore inconnu, ils étaient généralement utilisés au début comme parures, entre deux bijoux en verroteries et perles.
Plus tard, à partir du XVIè siècle, les Européens qui allaient vers l'Inde faisaient escale à Madagascar avec leurs marchandises et leurs monnaies nationales. C'est ainsi que les Portugais introduisirent le piastre, devenu "parata", et les Espagnols le real, devenu "ariary". A moins que ce dernier ne soit connu des Malgaches bien avant, par l'intermédiaire toujours des Arabes. "Le real est une expression espagnole reprise par les Arabes qui y ont ajouté l'article défini Al ou Ar. C'est donc devenu Al ou Ar real", selon une communication personnelle de l'historien Aimé Rambelo Razafindrakoto (Vonin'Oliva), auteur d'un ouvrage sur l'histoire de Madagascar et des Merina (2003). Selon lui, l'ariary "gasy" était originellement constitué de 4f 80 tandis que l'ariary "vazaha", de conception récente, est de 5 francs. Quoi qu'il en soit, la monnaie introduite majoritairement au pays était les pièces d'argent de 8 reales provenant de l'atelier monétaire de Mexico.
L'adoption progressive de la monnaie entraîne une inflation, certainement la première que l'histoire ait jamais notée à Madagascar. Le père jésuite portugais, Luis Mariano, remarquait en 1613 que "les indigènes vendent leurs articles de commerce très cher ; ils acceptent en paiement de piastres, de réaux..." ; tandis qu'à Fort-Dauphin, les Français étaient dans l'obligation de battre monnaies sur place afin de pouvoir continuer à commercer avec les locaux. Aucun exemplaire de ces monnaies, les premières à être fabriquées à Madagascar, ne fut trouvé. Vraisemblablement copie des monnaies françaises, elles ont dû se mélanger, sans que l'on puisse les distinguer, des monnaies frappées en France.
"TARAIKY" OU L'ARGENT DES ANCÊTRES
Il faut attendre le XVIIIè siècle pour retrouver des indications sur une autre fabrication locale de monnaie. Cela s'est passé sur les Hautes terres dont la population, obligée de s'organiser pour résister aux razzias des traitants d'esclaves venant des côtes, gagnait en puissance. Selon les Grandidier dans "Histoire politique et coloniale", on offrait des pièces d'argent dites "taraiky" pour honorer l'idole Ikelimalaza au temps d'Andriambelomasina. Les pièces étaient "faites en Imerina par quelques Blancs y résidant", probablement des Arabes venus de la côte nord-ouest, le terme "vazaha" servant à désigner originellement tous les étrangers. Le "taraiky" peut être considéré comme la première unité monétaire authentiquement malgache, d'autant plus qu'on l'appelait également "volan-drazana" (l'argent des ancêtres) si au moins on aurait pu en trouver des spécimens. Ce qui n'est pas le cas. Comme les pièces de Fort-Dauphin, il pourrait simplement s'agir de copies de monnaies étrangères, tel que justement le real. Selon Leguével de Lacombe dans "Voyages à Madagascar et aux Iles Comores (1823-1830)", "Les Hovas (...) fabriquaient autrefois de fausses piastres d'Espagne dont l'imitation était si parfaite que les Blancs eux-mêmes y ont longtemps été trompés".
Faute d'une monnaie fabriquée localement, la Grande île se trouve inondée par une foultitude de pièces. D'autant plus que, comme disaient J. et S. Chauvicourt dans "Les premières monnaies malgaches" in "Bulletin de Madagascar" (février 1968), "l'effondrement de l'empire colonial espagnol au début du XIXè siècle, avait entraîné la fin du monnayage espagnol comme système mondial. Cependant, les républiques latino-américaines indépendantes : Mexique, Bolivie, Pérou, etc. qui possédaient des richesses minières fabuleuses, poursuivirent la fabrication de monnaies se rapprochant du standard espagnol".
C'est ainsi qu'il y avait le "ngita", dans le sens de enchevêtré, une piastre espagnole caractérisée par la richesse de ses détails ; le "tanamasoandro", une piastre mexicaine avec un bonnet phrygien et l'inscription "Libertad" auréolé d'un rayon de soleil ; le "tokazo", originaire de Bolivie avec le profil de Bolivar, côté face, et un arbre, côté pile ; le "malamakely", piastre peu épaisse datant de la Iè République française ; le "behatoka", pièce de Louis XVIII et Charles X dont les profils représentaient de fortes nuques ; le "tombontsisina" ou "tomboka", piastre de l'Union latine dont l'exergue était marqué en creux au lieu d'être en relief ; le "mandrihavia", pièce de Louis-Philippe ; "l'ampongabe" de Napoléon III, les Malgaches ayant pris pour un gros tambour les armes de l'Empire ; le "tranom-pitaratra", pièce italienne, parce les armes de Savoie de Victor-Emmanuel ressemblent à un panneau vitré ; le "volavavy", pièce française figurant Marianne ; et enfin et surtout le "tsangan'olona", une pièce datant des IIè et IIIè République française figurant trois personnages debout avec l'inscription "Liberté, égalité, fraternité". C'est à l'époque, plus précisément en 1855, que l'on situe les véritables débuts de l'ariary. Valant 5 francs à l'origine, un "tsangan'olona" se négocie au bas mot à 125 000 Fmg actuellement chez les antiquaires, en raison de sa bonne teneur en argent et d'une certaine croyance populaire que lui attribue des vertus magiques.
MONNAIE COUPEE
Les premières tentatives de création d'une monnaie authentiquement malgache survint avec l'avènement du "Royaume de Madagascar", ainsi que les Britanniques reconnurent le royaume Merina après son extension vers les côtes. En 1826, suite à ses audacieuses réformes, Radama Ier fit une tentative de fabrication de monnaie avec son effigie. Pesant 13 gr, l'exemplaire unique de cette pièce d'argent se trouvait au Palais de la Reine. Du moins avant l'incendie de 1995. Sous le règne de Radama II (1861-1863), la "Charte lambert" inclut la fabrication de monnaie avec le portrait du roi. Les projets resteront en veilleuse jusqu'à l'avènement de Ranavalona III au trône en 1883 qui envisageait d'échanger le trésor accumulé dans les caves du Palais par la reine Rasoherina, lequel serait de 800 000 francs en piastres mexicaines. Des ateliers monétaires européens se mirent alors à fabriquer des échantillons de monnaies, notamment de 5 francs, de 10 centimes et de "kirobo" (1f 25).
On prête également à Ranavalona III le dessein de mettre fin à la circulation de la monnaie d'argent coupé afin de la remplacer par une monnaie divisionnaire. Pour remédier au manque de petite monnaie, la population fut amenée à couper le piastre en morceaux. Ceci va donc du ariary (5 francs) au variraiventy (1/720è), en passant par le loso, de l'arabe nusf ou nus (demi-franc) ; le kirobo, de l'arabe roba signifiant un quart ; l'iraimbilanja bien sûr (1/5è) ; le sikajy, de l'espagnol scods et de l'italien scudi (0f 60) ; le voamena, d'après la graine de l'abrus precatorius (1/24è) ; etc.
Le projet de Ranavalona III n'aboutit que lorsqu'elle fut renversée par la conquête coloniale française qui acheva d'instituer l'unité monétaire de l'île. En 1900, 4,9 tonnes de monnaie coupée furent remplacées dans la circulation par 831 753, 42 francs français. Passons sur les différentes espèces monétaires émises sous la colonisation et qui n'intéressent que les numismates pour signaler simplement que le droit de battre sa propre monnaie ne sera de nouveau permis à Madagascar qu'avec le retour de l'indépendance. En 1965, l'Institut d'émission, actuellement Banque centrale, mit en circulation les premières pièces de 2 francs et de 1 franc frappées de l'inscription "Famoahambolan'ny Repoblika Malagasy".
Quarante ans après, l'ariary remplace le franc. Une révolution beaucoup plus pour le citadin, habitué à raisonner en franc, que pour la masse rurale qui a toujours compté en ariary. On en attend les résultats des premières évaluations qui porteront, entre autres sur deux aspects majeurs : la consommation, perturbée par les fastidieuses exercices de conversion, s'en trouvera-t-elle ralentie et le basculement entraînera-t-elle une nouvelle inflation, comme ce fut le cas en Europe avec euro, la conversion - surtout avec les arrondis - ouvrant la porte à tous les abus ?
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Les principales subdivisions de l'ariary
1/2 : loso
1/3 : sasanangy
1/4 : kirobo
1/5 : iraimbilanja
1/6 : venty
1/7 : lasitelo
1/8 : sikajy
1/9 : sikajy (moins eranambatry)
1/10 : lasiroa
1/12 : roavoamena
1/16 : lasiray
1/ 18 : efatrambatry
1 /24 : voamena
1/48 : ilavoamena
1/72 : eranambatry
1/144 : varidimiventy
1/720 : variraiventy
Entre elles se situent le sikajy dimy (3 f), venty & kirobo (2 f), sikajy telo (1f 80), lasiray & kirobo (1f 50), kirobo & voamena (1f 40), kirobo latsak'ilany (1f 10), lasiventy (0f 90), fitoventy & voamena (0f 25), latsaka varifitoventy ou latsapaheniny (0f15), varifitoventy (0f 05), varienimbety (0f 04), variefabenty mahery kely ou varifitoventy mihodivitra kely (0f 035), variefabenty latsaka kely (0f 032), variteloventy mahery kely (0f 025) et variteloventy (0f 02)
Randy Donny
Publié dans "Les Nouvelles" du 03/01/2005
13:35 Publié dans Politique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Madagascar, économie, monnaie | Facebook