Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

05/11/2018

Démocratie à Madagascar : beaucoup d’apôtres, mais pas assez d’actes.

Le Haut Conseil pour la Défense de la Démocratie et dMadagascar, HCDDED, Randy Donny, démocratiee l’Etat de Droit (HCDDED) est opérationnel administrativement depuis mars 2018, mais ses membres étaient déjà prêts depuis 2016 avec les premières élections des différents représentants devant le composer. Pour faire connaître que le HCDDED est dans la place et compte bien y rester pour se constituer en observatoire et balise aux éventuelles atteintes aux libertés publiques et aux principes démocratiques de manière indépendante, cet organe constitutionnel a sorti un magazine qui se présente également comme un laboratoire d'idées. En voici un exemple, une réflexion sur le processus démocratique à Madagascar.

S’il y a un mot dont tout le monde se prétend fervent défenseur à Madagascar, c’est bien celui de démocratie. A tous les échelons de la société, et à la moindre occasion, chacun s’en affirme militant et s’en proclame porte-flambeau. Mais concrètement, cette adhésion affichée par les mots ne se traduit pas nécessairement dans les actes. En effet, on constate au quotidien le grand écart entre principes démocratiques et applications pratiques, du haut en bas de la pyramide des citoyens. Coup d’Etat au nom de la démocratie ; déclarations sécessionnistes au nom de la démocratie ; « fake news », calomnies et insultes sur les médias sociaux au nom de la démocratie ; occupations de la voie publique par les marchands de rue au nom de la démocratieetc. La classe politique connaît parfaitement les principes de la démocratie quand elle est dans l’opposition, mais elle a tendance à être frappée d’amnésie quand elle accède au pouvoir.Il importe donc de se donner une compréhension commune du concept, pour tenter de comprendre ce dont on parlevraiment quand on évoque le mot. En effet, trop occupés à revendiquer les droits, beaucoup de Malgaches oublient les devoirs et obligations inhérents à la démocratie.

La démocratie, il faut bien plus que des élections.

Définir la démocratie n’est pas chose aisée. Parmi les nombreuses définitions possibles, nous avons retenuecelle du Prix Nobel d’économie Amartya Sen quidécrit la démocratie comme « la possibilité pour tous les citoyens de participer aux discussions politiques et d'être ainsi en mesure d'influencer les choix concernant les affaires publiques »(Sen, 2006, p. 12).

Dans l’édition 2002 de son Rapport mondial sur le développement humain (PNUD, 2002, p. 4), le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) a précisé en six points les critères d’un régime démocratique :un système de représentation, avec des partis politiques et des groupes de défense d’intérêts qui soient opérationnels ; un système électoral garantissant des élections libres et non entachées d’irrégularités, ainsi que le suffrage universel ;un système d’équilibre reposant sur la séparation des pouvoirs, avec une branche judiciaire et une branche législative indépendantes ;une société civile active, à même de contrôler les actions du gouvernement et des entreprises privées, et de proposer des modes différents de participation politique ; des médias libres et indépendants ; un contrôle effectif des civils sur l’armée et les autres forces de sécurité. Chacun évaluera en son âme et conscience la performance de Madagascar sur chacun de ses points.

Les élections sont donc importantes, mais elles ne sont pas suffisantes pour déterminer du caractère démocratique d’un régime. La mise en avant de l’existence d’élections pour prétendre que la démocratie existe, sans chercher à considérer les autres aspects, reflète ce que Terry Karl qualifie d’ « électoralisme fallacieux »(fallacy of electoralism)(Diamond, 1997, p. 9). Il est donc nécessaire de faire la distinction entre « démocratie électorale » et « démocratie libérale ». Clarke et Foweraker invitent à opérer une distinction entre les conceptions minimaliste (« thin ») et maximaliste (« fat ») de la démocratie. Le niveau minimaliste se limite à une seule caractéristique institutionnelle, comme par exemple la compétition électorale, tandis que le niveau maximaliste s’attache à embrasser une large vision de la démocratie dans laquelle les institutions, les processus et les conditions de libertés civiles et de droits politiques permettent une réelle compétition pour le pouvoir  (Masunungure Eldred (Ed.), 2009).

L’illustration 1, œuvre du dessinateur de presse Aimé Razafy, reflète les lacunes du système électoral telles qu’il les voyait à Madagascar en 1992, et quela société civile continue jusqu’à présent d’évoquer dans ses interventions.

Madagascar, HCDDED, Demokrasia, Randy Donny

Illustration 1. Un système électoral à la fiabilité limitée (auteur : Aimé Razafy, 1992).

La pratique discutable de la démocratisation par voie de crise.

Rappelons que du fait de leur caractère insatisfaisant par rapport aux normes démocratiques, il y a une volatilité extrêmement rapide des acquis d’une élection à Madagascar. Philibert Tsiranana, élu en janvier 1972 par 99,78% des voix, est renversé par la rue en mai de la même année. Didier Ratsiraka, réélu au premier tour des élections de mars 1989 par 63% des voix pour un troisième mandat, doit faire face à une grave crise à partir de juin 1991.  Albert Zafy, élu par 66% des voix en février 1993, doit quitter le pouvoir suite à une procédure d’empêchement votée en 1996 par une Assemblée nationale. Marc Ravalomanana, réélu par 53% des voix en 2006, est balayé par la crise au premier trimestre 2009. Une élection peu convaincante ne produit donc pas de légitimité durable. Quatre crises politiques violentes en cinquante-huit ans d’indépendance républicaine : l’histoire politique du pays nous jette à la face les conséquences d’élections dont les résultats ne s’imposent pas à tous.

Nous définirons une crise politique violente comme une « Situation de rupture du contrat social que les institutions ne sont plus capables de gérer, et dans laquelle au moins une des parties en présence utilise la violence de façon répétée pour faire triompher une cause politique telle que l’accès ou le maintien au pouvoir ».

L’illustration 2, œuvre du dessinateur de presse Aimé Razafy reflète son soupçon sur les véritables motivations des crises politiques : l’accès aux bénéfices (symbolisé par un festin) que permet une arrivée au pouvoir.

Madagascar, HCDDED, Demokrasia, Randy Donny

Illustration 2. L’arrivée au pouvoir grâce à une crise politique permet de « manger » (Aimé Razafy, 1992).

De 1960 à 2015, à une seule exception près (Norbert Ratsirahonana), tous les chefs d’État qui ont exercé le pouvoir à Madagascar ont eu directement ou indirectement affaire à une crise violente, soit pour arriver au pouvoir, soit pour le quitter, ou même pour certains d’entre eux, dans les deux cas. Ainsi, sur cette période, aucun Président élu n’a pu terminer son mandat ou sa série de mandats octroyé(e) par les élections. Soit il a été renversé par la rue, soit un événement imprévu a raccourci son mandat et a débouché sur une Transition ou un transfert de pouvoir dans des conditions extraconstitutionnelles.

Certes, toutes les alternances n’ont pas été violentes. Il y a en effet eu des cas d’alternance paisible, mais qui se sont produits hors du cadre constitutionnel : désignations (soit sous forme de transmissions de pouvoir ou de votes dans un cercle restreint), ou bien par le biais d’élections ayant elles-mêmes clôturé une transition générée par un épisode violent (crise politique ou assassinat). Les arrivées au pouvoir du Professeur Zafy et de Hery Rajaonarimampianina rentrent dans ce dernier cas, et ne peuvent donc pas être considérées comme desalternances électorales paisiblescaractérisant « aujourd’hui les démocraties qui fonctionnent » (Quermonne, 2003, pp. 8-9).

Il n’y a donc eu qu’une seule alternance démocratique paisible à Madagascar durant les 55 premières années d’indépendance républicaine : celle de 1997 entre Norbert Lala Ratsirahonana et Didier Ratsiraka, ce dernier étant vainqueur d’une élection à laquelle le chef d’Etat sortant participait. Mais M. Ratsirahonana était un chef d’Etat désigné, et non élu. Par conséquent, durant ces 55 ans, aucun chef d’Etat arrivé au pouvoir par le biais d’une élection n’a été en mesure de remettre le pouvoir à un opposant arrivé au pouvoir par les urnes.

Comment évaluer la démocratie malgache ?

Au-delà des idéologies partisaneset des arguments de propagande qui ouvrent un boulevard à une compréhension à géométrie variable de la démocratie, il faut souligner que celle-ci peut se mesurer par le biais de certains indicateurs. Pour tenter d’apporter un regard objectif sur le sujet, nous proposerons trois graphes couvrant au moins une décennie pour nous éclairer sur la question.

La figure 1 est produite à partir des données du projet Varieties of Democracy (V-Dem) mené par l’Université de Gothenburg en Suède. L’index de démocratie libérale reflète la réponse à la question suivante : « Dans quelle mesure l'idéal de la démocratie libérale est-il atteint ? ». Dans la conception du projet V-DEM, « le principe libéral de la démocratie souligne l’importance de la protection des individus et les droits des minorités contre la tyrannie de l'Etat et la tyrannie de la majorité ». Sur une échelle de 0 à 1 (1 étant la meilleure note), on constate que la crise de 2009 a annihilé tous les acquis de la transition de 1991-1993 en matière de démocratie libérale. En effet, elle a aggravé la baisse constatée dans les années précédentes et a ramené le niveau de Madagascar à la même note qu’en 1975 (0,10).

Madagascar, HCDDED, Demokrasia, Randy Donny

Figure 1. Index de démocratie libérale à Madagascar (source : https://www.v-dem.net)

La liberté de la presse est considérée comme un bon indicateur de la démocratie. La figure 2 illustre le rang de Madagascar dans le classement établi par Reporters sans Frontières. On y observe que le meilleur rang est celui de 2003, qui voit Madagascar être dans les 50 premiers depuis que ce classement existe. Malheureusement, ce rang va se détériorer progressivement dès l’année suivante, jusqu’à la 134ème place engendrée par le coup d’Etat de 2009.

Madagascar, HCDDED, Demokrasia, Randy Donny

Figure 2. Classement de Madagascar en matière de liberté de la presse

(source : Reporters sans frontières).

Enfin, la figure 3 illustre l’évolution de l’Index de démocratie pour Madagascar, tel qu’établi par The Economist Intelligence Unit. Parmi les quatre régimes possibles (régime autoritaire, régime hybride, démocratie imparfaite, démocratie totale), Madagascar n’a jamais pu dépasser le statut de régime hybride. Les années 2009 à 2012 ont même été les pires depuis que ce classement existe.

Madagascar, HCDDED, Demokrasia, Randy Donny

Figure 3. Evolution de l’Index de démocratie pour Madagascar (source : The Economist Intelligence Unit).

Ces indicateurs permettent de constater que Madagascar a encore du chemin à parcourir avant de pouvoir prétendre être une démocratie complète. Toutefois, ils permettent également de mesurer les nombreuses avancées depuis 1960, malgré certaines périodes de recul.

Il faut mettre fin à la « démocratie-vitrine ».

En 1994, dans l’enthousiasme de l’arrivée au pouvoir du Professeur Albert Zafy, Jaona Ravaloson écrit ceci : «Au moment où, dans plusieurs pays, la transition démocratique renouvelée et redynamisée par le discours de la Baule patine, la réussite du cas malgache pourrait-elle lui donner un second souffle et une nouvelle jeunesse, selon la désormais classique théorie des dominos ? Dans tous les cas, Madagascar a apporté sa brique à la construction d’un nouvel ordre mondial, celui né des cendres de la guerre froide et de la décomposition de l’ex-empire soviétique »(Ravaloson, 1994, p. 127). La vie politique depuis l’écriture de ces lignes montre le caractère fragile des avancées dans le processus de démocratisation.

Le défi est donc de capitaliser les acquis tout en évitant les reculs. Renforcer la capacité du pays à organiser des élections crédibles et en mesure de produire des résultats qui s’imposent à tous, vainqueurs comme vaincus, est un élément fondamental de la démocratisation. Le processus doit instaurer la confiance pour éviter de prêter le flanc aux contestations, portes ouvertes aux crises post-électorales. Latension actuelle qui précède le premier tour de l’élection présidentielle de novembre 2018 doit inviter les dirigeants et les citoyens à redoubler de vigilance.Les récriminations sur les lacunes de la liste électorale ne sont pas toutes dénuées de fondement, tout comme les interrogations sur les financements de campagne électorale. Dans plusieurs cas, leur abondance pose deux questions : primo, d’où viennent les fonds ; secundo, quelle est la contrepartie ou le retour sur investissement qui est exigé par les sponsors ou investisseurs ? En l’absence d’un cadre qui permet le contrôle, la démocratie malgache ne pourra être que dénaturée par l’argent, comme le montre l’illustration 3, sous la plume de Pov.

Madagascar, HCDDED, Demokrasia, Randy Donny

Illustration 3. Une démocratie qui s’écrit à coups de liasses de billets (source : Pov / l’Express de Madagascar)

Si Madagascar veut mettre fin au moule crisogène qui le prédispose depuis des décennies aux crises récurrentes, il faut que les institutions, la société civile et les médias trouvent les moyens de mettre fin à la « démocratie-vitrine », marquée par une superficialité dans laquelle les mots et les engagements envers la démocratie ne sont pas toujours suivis de faits, tant au niveau des dirigeants que des opposants. Par exemple, se baser sur des noms de baptême (république « démocratique », république « humaniste et écologiste » etc), l’organisation d’élections dans lesquelles les électeurs ne se retrouvent pas, les autoproclamations d’un statut de démocrate, ou la manipulation de dispositions pénales par l’Exécutif pour empêcher les voix discordantes. On l’a constaté depuis des décennies :de telles pratiques ne peuvent asseoir une démocratie et une légitimité durables. Améliorer cette situationest un travail de longue haleine, et surtout, une œuvre collective.Mais en a-t-on la volonté, et surtout, en a-t-on les moyens ?

Andrianirina R.

Doctorant en science politique

Institut d’Etudes Politiques Madagascar

Travaux cités

Diamond, L. (1997, Mars). Is the third wave of democratization over ?, Working Paper #236.Récupéré sur Kellogg Institute: https://kellogg.nd.edu/publications/workingpapers/WPS/237.pdf

Masunungure Eldred (Ed.). (2009). Defying the Winds of Change. Zimbabwe’s 2008 Elections. Consulté le Juillet 20, 2014, sur Konrad-Adenauer-Stiftung: http://www.kas.de/upload/dokumente//2010/05/Defying_Intro.pdf

PNUD. (2002). Rapport Mondial sur le Développement Humain. Bruxelles: De Boeck Universtity.

Quermonne, J.-L. (2003). L'alternance au pouvoir. Parid: Montchrestien.

Ravaloson, J. ( 1994). Transition démocratique à Madagascar. Paris: L'Harmattan.

Sen, A. (2006). La démocratie des autres. Paris: Payot et Rivages.

 

 

30/03/2018

10 questions que vous avez toujours voulu poser sur le HCDDED sans jamais oser le faire

L’esprit de création du Haut Conseil pour la Défense de la Démocratie et de l’Etat de Droit (HCDDED) est fondé sur la promotion de la démocratie et de la restauration de l’Etat de droit.

 

  1. Le HCDDED est-il constitutionnel ?

La Constitution de la IVème République a prévu en son article 43 la mise en place du HCDDED. En effet, la création d’une structure chargée de superviser l’application de l'Etat de droit, libertés publiques, démocratie et protection des droits de l’Homme s’avère primordiale pour éviter d’éventuelles dérives au sein de l’administration, ainsi que d’éventuelles atteintes aux libertés publiques et aux principes démocratiques.

  1. Quelles sont sa mission et ses attributions ?

D’une manière générale, le HCDDED est tenu d’observer le respect de l’éthique du pouvoir, de la démocratie, du respect de l’Etat de Droit, et de contrôler la promotion des droits de l’Homme. Dans cette optique, le Haut Conseil pour la Défense de la Démocratie et de l’Etat de Droit peut formuler des recommandations dont il juge utiles.

  1. N'y a-t-il pas un risque de conflits de compétences avec d'autres institutions?                                                                                                                        

Les dispositions des lois y afférentes ont été prises en compte afin d’éviter des conflits de compétence entre les différentes Institutions chargées de la défense de la démocratie ou des droits de l’homme, déjà existantes, telle que la Médiature et la Commission nationale indépendante des droits de l’Homme (CNIDH).  

Par ailleurs, Conformément aux dispositions de l’article 136 de la Constitution, deux membres titulaires et deux suppléants de la Haute Cour de Justice (HCJ) sont des personnalités issues du Haut Conseil pour la Défense de la Démocratie et de l’Etat de Droit.

  1. Le HCDDED peut-il intervenir dans le secteur privé ?

Le Haut Conseil est institué pour se constituer en observatoire et balise aux éventuelles mauvaises pratiques dans l’Administration aussi bien dans les domaines publics que privés.

C'est un organe indépendant appelé à superviser notamment l’application des codes d’éthique, de déontologie et des normes de comportement par les titulaires des charges publiques ou tout autre document y tenant lieu dans le Secteur privé.

  1. Le HCDDED peut-il être saisi par de simples citoyens ?

Toute personne s’estimant lésée par le fonctionnement d’un service public ou privé non conforme aux principes démocratiques et aux règles de droit peut saisir le HCDDED qui est tenu de donner suite par écrit à toute saisine et de signaler tout comportement contraire à l’éthique à toute Institution ou entité concernée et formuler toute recommandation assortie de mesures concrètes et d’un calendrier, à toute Institution ou instance mise en cause.

  1. Y a-t-il une protection des sources ?

Le HCDDED veille à la protection de ses sources. De même, aucune mention permettant l'identification des personnes dont le nom aurait été révélé ne doit figurer dans les documents publiés.

  1. Qui sont les membres ?

Le HCDDED est composé de 9 membres reconnus sur le plan national.

Madagascar, HCDDED, Randy Donny, HCJ, Etat de droit, démocratie

Une partie des membres du HCDDED. De g. à d., Fulgence Rabetafika, Pierre Lenoble, Randy Donny et Koera Ravelonarivo.       

- Désigné par le Président de la République : Claude Pagès, entrepreneur, ancien maire de Majunga.

- Elu par le Sénat : Pierre Lenoble Navony, historien, ancien vice-président CT.

- Elu par l’Assemblée Nationale : Fulgence Rabetafika, Commissaire de Police retraité.

- Elue par la Haute Cour Constitutionnelle : Annick Tsiazonangoly, magistrat.

- Elu par la Cour Suprême réunie en assemblée générale : Koera Ravelonarivo, magistrat.

- Elu par la Société civile : Odilon Tatagera, financier.

- Issu de la CNIDH : Anaclet Imbiky, magistrat.

- Elu par l’Ordre des Journalistes : Randy Donny, historien.

- Elu par l’Ordre des Avocats : Roland Ravelontsalama.

  1. Les membres disposent-ils d'une immunité ?

Le HCDDED est un organe indépendant. Ses membres travaillent en toute indépendance, et ne peuvent être poursuivis, recherchés, arrêtés, détenus ou jugés à l’occasion des opinions qu’ils émettent ou des actes qu’ils accomplissent dans l’exercice de leurs fonctions.

  1. Combien gagne les membres du Haut Conseil ?

Les conditions et modalités d’attribution des indemnités allouées aux membres du Haut Conseil sont déterminées par décret pris en Conseil des Ministres.

Les dépenses de fonctionnement sont engagées conformément aux principes et règles budgétaires et comptables de la comptabilité publique.

  1. Quid de la redevabilité ?

Le Haut Conseil doit présenter un rapport annuel de ses activités à l’ouverture de la première session du Parlement avec copie adressée aux Chefs d’Institutions de l’Etat

20/06/2012

Madagascar, ton avenir fout le camp !

No future. C’est certainement la devise qui sied à Madagascar, tant tout le monde détruit tout. Les écologistes de salon accusent les cultivateurs de détruire l’environnement et l’opposition de bazar accuse la Transition de détruire l’économie. Mais en fait, chacun détruit à qui mieux-mieux. Madagascar, démocratie, Andry Rajoelina, Marc Ravalomanana, actualité, presse, chronique
Les politiciens détruisent la politique, qu’ils soient opposants ou au pouvoir. La politique n’est plus cette démarche désintéressée pour développer la cité, mais un moyen pour se remplir les poches, quitte à poignarder ses amis dans le dos. Qui peut garantir que lorsque ces politiciens qui se disent de l’opposition arrivent au pouvoir, d’Andrianjaka Rajaonah d’Orimbato au Magro, en passant par les différents clowns unis par  la nostalgie du 13-Mai, ils vont oublier leurs intérêts personnels pour enclencher la vitesse supérieure du  développement ? Qui peut garantir que lorsque Marc Ravalomanana reviendra au pouvoir, il ne confondra plus ses poches avec la caisse de l’Etat (raison initiale de la suspension de ses aides par l’Union européenne) et que Madagascar deviendra plus démocratique, plus libre et mieux gouverné ? Il existe un précédent : un ancien président avait déjà fait un retour en force, Didier Ratsiraka pour ne pas le nommer, avec sa promesse « humaniste et écologique ». Madagascar était-il devenu pour autant plus démocratique, plus libre et mieux gouverné ?
Les enseignants détruisent l’éducation. Enseigner n’est plus un sacerdoce, un métier que l’on a choisi parce qu’on croit en la force de l’éducation pour développer le pays. C’est juste un débouché professionnel où l’on a atterri parce qu’on n’a pas trouvé mieux. Les enseignants d’aujourd’hui ne sont plus comme ceux de Papa qui, lorsqu’ils trouvent que leur salaire ne leur suffit plus, reprennent leurs études pour décrocher de nouveaux diplômes en vue d’une promotion. Il y en a alors qui sont passé d’instituteur à professeur d’université. Pour obtenir une augmentation, les enseignants d’aujourd’hui, d’instituteurs à pseudo-chercheurs, préfèrent prendre en otage leurs propres élèves, qui sont manifestement le dernier de leurs soucis, quitte à provoquer une année blanche. Qui peut garantir que lorsqu’ils auront l’argent qu’ils demandent, l’enseignement s’en trouvera amélioré ?
Les médecins et leurs auxiliaires détruisent la médecine et le monde hospitalier en refusant de recevoir les malades pour cause de grève. Ce qui constitue à la fois un reniement du serment d’Hippocrate et une non assistance à personne en danger, autrement-dit un crime.  Les forces de l’ordre détruisent la sécurité en louant des armes aux bandits pour arrondir leur fin de mois. Remenabila en est la fatale conséquence. Les  magistrats détruisent la Justice en refusant de travailler pour le peuple en raison d’un conflit avec une autre corporation… Qui peut garantir que si on leur donne ce qu’ils demandent, les patients seront mieux soignés, le citoyen mieux sécurisé et la justice mieux rendue ? Le tout, loin de la corruption et de tous les autres maux qui gangrènent le service public ?...
On ne peut que souhaiter bonne chance à celui, quel que soit son nom, qui conduira la IVe République. Il aura du chantier à faire. Et le plus gigantesque sera celui de colmater le gouffre que Destruktor a laissé.

Randy D. in "L'Observateur" du mercredi 20 juin, pp. 2

13/04/2011

Au nom de Gbagbo, de Ouattara et de la Françafrique

Bien avant que Gbagbo ne soit arrêté, le film de son arrestation me rappelle d'autres épisodes de l'histoire (de Mussolini à Saddam Hussein, en passant par les Caeucescu...), j'ai publié cette note das "L'Observateur". Réflexion.

 149-2.jpg

20/05/2009

L’Afrique noire est (encore) mal partie

Je me souviens de ce livre qui trônait sur la bibliothèque familiale. Signé René Dumont, « L'Afrique noire est mal partie » a fait l'effet d'un séisme à sa sortie, en 1962. René Dumont est un agronome qui, entre 1956 à 1960, a parcouru l'essentiel de ce qu'on appelait alors le Tiers-Monde. Un nomadisme qui l'a amené à passer par Madagascar. René Dumont a laissé différentes publications sur les relations entre l'agriculture et le développement à Madagascar.

Plus de quarante ans après la décolonisation, l'Afrique noire est encore mal partie. Il n'y a pas que l'agriculture. Il y a aussi la politique. Au temps de la Guerre froide, les choses étaient simples : quand un dictateur se fait renverser au nom de la Révolution, l'URSS s'empresse de le reconnaître et le tour est joué. Ou quand un président rouge se fait assassiner par un gars à a solde de l'Occident, pour reprendre une expression d'époque, il suffit que les Etats-Unis avalisent l'opération pour que le bloc ouest suit.

Aujourd'hui, ce n'est plus le cas. Autre temps, autres mœurs. L'idéal socialiste s'est effondré avec le mur de Berlin. Même Manandafy Rakotonirina, qui a enseigné, prôné et déifié la dictature du prolétariat pendant plusieurs décennies s'est converti à la démocratie libérale. Et c'est là le hic. Pas Manandafy Rakotonirina. Non. C'est parce que la démocratie à l'occidentale rime avec Constitution, élection, alternance, dialogue et tout le tsouin tsouin qui fait que le système politique américain soit sculpté sur le mont Rushmore. Or, en Afrique, les dictateurs et autres assassins, qu'ils soient les enfants de Marx ou de Coca-Cola, n'ont pas disparu du paysage après 1989. Il y en a même qui baisent leurs peuples depuis l'année érotique 1969.

L'époque soviétique est révolue. Sauf en Erythrée où le président Issaias Aferworki continue un totalitarisme sans faille, allant jusqu'à suspendre les libertés depuis 2001. Si, par pur hasard, le peuple érythréen, trop longtemps privé de démocratie, arrive à changer les cours des choses dans cette prison à ciel ouvert, va-t-on crier au coup d'Etat et demander la restauration d'un régime qui ne fait que le plonger dans l'abîme de la misère au quotidien ?

Une alternance démocratique par les urnes est-elle possible avec des gens comme Yahya Jammeh, sergent devenu président de la Gambie à 29 ans après un putsch et dont on connaît la grande agressivité à l'endroit de ceux qui remettent en cause sa manière de gouverner ? Ce petit pays anglophone enclavé dans le Sénégal a beau abriter le siège de la Commission africaine des Droits de l'Homme et des peuples, Yahya Jammeh clame haut et fort : « Si j'ai envie de fermer un journal, je le ferai ».

Téodoro Obiang Nguema va encore plus fort : «Il peut décider de tuer sans que personne lui demande des comtes et sans aller en enfer », disait de lui la radio publique. D'ailleurs, la presse privée ni l'Opposition n'existent dans ce « Koweït de l'Afrique » en raison de la « pauvreté ». Mais n'allez surtout pas rêver de renverser le « Dieu de la Guinée Equatoriale ». Ce serait faire preuve d'atteinte à la démocratie et aux Droits de l'Homme. Même s'il est de notoriété publique que Téodoro Obiang, arrivé au pouvoir en renversant son propre oncle, fait pire que les autorités coloniales dans l'exploitation à son profit personnel des richesses de son propre pays. Et il n'est pas le seul.

Le 18 juin 2007, le parquet de Paris a ouvert une enquête préliminaire à l'encontre de Téodoro Obiang, Denis Sassou Nguesso, Omar Bongo, Blaise Compaoré - l'assassin du « Ché d'Afrique », Thomas Sankara - et José Eduardo dos Santos et leur entourage, accusés par trois associations françaises (Survie, Sherpa et la Fédération des Congolais de la Diaspora) de "recel de détournement de fonds publics". Le 2 décembre 2008, pour demander la restitution de leurs biens mal acquis supposés, Transparency International France, l'association Sherpa et un citoyen gabonais ont déposé une nouvelle plainte assortie d'une constitution de partie civile visant Téodoro Obiang, Omar Bongo et Denis SassouSecretary_Rice_and_President_Obiang.jpg Nguesso ainsi que leurs entourages pour « recel de détournement de fonds publics ». Le 5 mai 2009, la juge Françoise Desset, du pôle financier de Paris, juge recevable cette plainte. Et dire que Téodoro Obiang a été reçu par Condoleeza Rice (Photo ci-contre)

En décembre 2008, l'Union européenne et Bretton Woods décident de suspendre les crédits pour Madagascar en raison de la mauvaise gouvernance de Marc Ravalomanana qui confond sa poche avec la caisse de l'Etat. Passons sur le hold-up permanent sur le pouvoir, notamment en période électorale. Saraléa Bernard, un officier de la Gendarmerie, a écrit dans « La Gazette de la Grande » du samedi 18 avril 2009.

« Pour s'assurer de la victoire dans tous les scrutins qui se sont succédé dans la Grande Ile durant son mandat et demi, Marc Ravalomanana a chargé la Digit.com de chiffrer et déchiffrer les résultats de chaque élection. Alors que cette société privée de traitement informatique appartenait à l'épouse du ministre Haja Nirina Razafinjatovo, son directeur de campagne lors de la présidentielle de décembre 2006 ! National Democratic Institute (Ndi), une Ong américaine spécialisée dans l'observation des élections, avait déballé l'arsenal des fraudes utilisé par le pouvoir Ravalomanana pour lui faire gagner l'élection présidentielle devant le corps diplomatique, la société civile et la presse nationale et internationale en début de l'année 2007, à l'hôtel Hilton d'alors.

Ainsi, la communauté internationale ne pouvait ignorer qu'il était simplement impossible de battre Marc Ravaomanana et son parti dans des élections. Le peuple avait-il alors d'autres solutions  que la rue pour se débarrasser d'un pouvoir qui a perdu sa confiance ? ».

Et pourtant. Et pourtant. En se réveillant le mercredi 18 mars 2009, enfin débarrassé d'un Marc Ravalomanana qui s'est enfui la veille, le peuple malgache aura vite fait d'attraper la gueule de bois en entendant que des pays étrangers condamnent l'instauration de la Transition vers une 4ème République après des mois de soulèvement populaire. Les Anti-Hat eux-mêmes le reconnaissent. Un communiqué en anglais de l'Alliance libérale démocrate qualifie le soulèvement anti-Ravalo comme d'un « popular rallies organized by the lumpenproletariat from the lower neighborhoods of Antananarivo » avant d'affirmer que les anti-Ravalomanana sont également composés de « local bourgeoisie coming from the Merina oligarchy and the rich roturiers, who had taken a lot of advantages from feudality and from the slave trade and are currently very dynamic within civil society organizations ». Mais alors, si le soulèvement contre Ravalomanana était le fait de la masse populaire + la bourgeoisie féodale et roturière, qu'est-ce qui reste pour le soutenir ? Pas la population des provinces en tout cas. Sinon, ce serait une démagogie de trop. Les pro-Ravalo sont passés maîtres dans ce genre de maladresses. Voilà pourquoi il est tombé.

La nature a horreur du vide. Marc Ravalomanana a démissionné et Andry Rajoelina a pris le pouvoir. L'ambaMalaza.jpgssadeur des Etats-Unis, Niels Marquadt, et celui d'Afrique du sud en sont témoins. Ils ont vu la lettre donnant le pouvoir à un Directoire militaire signé par Marc Ravalomanana, sans qu'un pistolet ne lui ait été mis sur la tempe. « La remise de pouvoir aux militaires est une façon diplomatique de démissionner", soufflera Niels Marquadt à Lala Rasendrahasina, président de l'église FJKM dont Marc Ravalomanana est le vice-président. La révélation est dans le numéro 509 du journal « Objectif Malaza » d'avril 2009. Diplomates et journalistes témoins des événements n'ont vu l'ombre d'un militaire rebelle. D'ailleurs, s'il y avait vraiment menace direct sur la personne de Marc Ravalomanana par des militaires rebelles, comme il le répète souvent dans son exil, ces derniers ne l'auront pas permis de donner le pouvoir à un Directoire militaire, sous peine d'être obligé de le prendre des mains du Directoire (épisode Episcopat) pour le donner ensuite à Andry Rajoelina ! Dans tous les cas, la bénédiction de la Haute Cour Constitutionnelle ne peut souffrir d'aucune contestation. Elle est souveraine et est la seule habilitée à reconnaître la constitutionnalité ou non d'un acte, sans que personne, encore moins une chancellerie étrangère en trouve à redire. La République a ses principes. Cela en fait partie.

Ces quelques points méritent, à mon avis, d'être éclaircis en ce moment où le problème de la reconnaissance internationale du régime de Transition à la malgache est sur la bonne voie. Un opposant ivoirien a osé évoquer l'exemple malgache. Depuis, il croupit en prison. Les dictateurs africains applaudissent des deux mains lorsque les occidentaux parlent de constitutionalité et d'alternance démocratique. Cela leur permet de rester indéfiniment au pouvoir. Il est interdit à un peuple, fut-il opprimé, de se soulever. Ah, l'Afrique ! Auparavant colonisé en raison d'idées économiques bâtardes. Maintenant de nouveau colonisé par des idées politiques que l'on a pervertit.