06/11/2022
Dédesse, témoin de la naissance du salegy moderne
Ses chansons berçaient mon enfance. Il faisait partie des auteurs-compositeurs que j'admirais. Dédesse, une sommité de la musique malgache, disparaît le 6 novembre 2022 à 71 ans. Retour sur le parcours d'un avant-gardiste et témoin de la naissance du salegy moderne.
Pendant mon enfance à Manakara, en 1976, je passais devant la vitrine du magasin Siditsidina qui vendait des disques dont celui-ci, de Dédesse. Je rêvais alors du jour où j'aurais les moyens de les acquérir. Siditsidina est devenu actuellement l'hôtel Sidi.
"Malakilaky anareo mandigny "zahay afara". Dépêchez-vous de venir nous succéder, chantait Dédesse dans "Malakilaky", face A d'un disque 45 tours sorti en 1979. Depuis, il a eu le temps de voir grandir le salegy moderne et ses flopées d'adeptes qui ne cessent d'apporteur leurs touches personnelles.
Né le 25 juillet 1951 à Antsiranana, que l'on se plaît communément à continuer à appeler Diego-Suarez, Dédesse, de son vrai nom Bezara Ernest, est à l'origine un musicien de cabaret. C'était au début des années 70 où le Diego by night battait son plein avec les marins français qui occupaient la base navale locale.
"A l'époque, Diego avait autant de groupes que d'endroits qui programment du cabaret le soir. Les Jockers, avec Papa James (Batteur) et Roger Georges (bassiste), officiaient à "La Taverne"; Les Requins avec Dédesse à la batterie, animait "Chez Pauline". Mais il y avait également des "électrons libres", des groupes qui ne dépendaient d'aucun établissement : Black Jazz, Pinders, les Anges Noirs et les Tigres avec "Bouboul" Bastui, le fils de l'auteur de "Mangina Zaza" (1)... Mais nul n'égalait la popularité de Los Matadores et du "Saïgonnais", note l'auteur de ces lignes, en 2008, après une enquête à Antsiranana en vue d'une biographie de Jaojoby Eusèbe (pp. 28). Ce dernier étant alors un des chanteurs de "Le Saïgonnais". Ceci dit, il y avait également le night-club Keng Weng où un batteur, Mily Clément, enchantait les clients avec l'interprétation de "Don't Go Breaking My Heart" d'Elton John.
Dédesse et les musiciens de sa génération ne juraient alors que par les standards de la musique américaine. Lui-même était fortement influence par le pop et le folk-song, sinon la variété française, et sortent des titres assez avant-gardistes. En témoignent "L'amour que j'ai pour toi Jany", prix de la chanson francophone en 1971, dont on peut déceler une influence Simon & Garfunkel. Mais il y a également "K'Aza Malahelo/Tiako Izy", "Tsaiky Be", et du pop-rock "Ndao Hiaraka Hilalao" et "Voninkazo Toa Raozy" qu'il enregistre avec D'S Group en 1977...
Deux événements vont changer le cours des choses et donner naissance au salegy moderne : la révolte anti-français de 1972 qui entraînent le départ des militaires français de la base navale de Diego-Suarez et l'interprétation du folklore traditionnel avec des instruments de musiques modernes.
Dans les cabarets, les clients se composent progressivement de nationaux et le répertoire s'y adapte.
"Lorsqu'il y a beaucoup d'étrangers, essentiellement des légionnaires, le répertoire est surtout composé de chansons étrangères. Lorsque la majorité du public est malgache, les chansons malgaches dominent. On voit même apparaître quelques titres africains. Ces derniers, popularisés par les disques "tapany maitso" (à moitié vert, en raison de la couleur de leurs jaquettes), sont souvent appelés "Congo". En réalité, ils viennent principalement du Kenya. C'est du moins ce qu'affirmait Freddy Ranarison qui avait produit la plupart de ces disques" (pp. 33-34).
Freddy Ranarison est justement le pionnier de l'adaptation des standards du folklore malgache, tel "Viavy Raozy". Jusque là, on se contentait d'enregistrer les chants folkloriques à la source, avec leurs auteurs accompagnés d'instruments traditionnels. Cette modernisation des rythmes traditionnels et leur vulgarisation marquent un tournant dans la musique malgache.
"Avant, on méprisait un peu les rythmes folkloriques. Bedafara Gilbert Andriamisy, un musicien qui a joué un moment au "Saïgonais" (1969-1972), se souvient que l'on se moquait de lui lorsqu'il lui arrive de jouer du garadeky, un cousin du salegy. Mais peu à peu, on se mettra de plus en plus à interpréter les chansons folkloriques avec des instruments modernes. La batterie remplace les maracas et les battements de mains et des pieds des chanteurs et de l'assistance., la guitare reprend les notes exécutées jusque là sur une valiha ou un marovany, la basse est calquée sur le son des tambours et l'orgue revisite la nappe hypnotique des accordéons. Freddy Ranarison poussera même la délicatesse jusqu'à inscrire sur la pochette de disque une leçon de danse "salegy" avec textes et figure de pas" (pp.36-37).
Outre Freddy Ranarison, un autre musicien va jeter les bases du salegy moderne : Jean-Claude Djaonarana, le batteur de Los Matadores.
"En s'inspirant du rythme des maracas et des battements de mains, [il crée] une alternance de charley et de grosse caisse ponctuée, de temps en temps, de quelques incursions vers la caisse claire. C'est ce qu'on appelle le "dontsiky" (pp. 41).
Bientôt, l'âge d'or des cabarets est révolu pour laisser la place aux bals poussières dans la brousse.
"A la fin des années 70, on se prend de moins en moins pour des Américains noirs pour devenir plus afro. Coiffure "brown", allusion à James Brown - c'est ainsi que l'on baptise la coiffure afro à Madagascar - pattes d'éléphant. C'est le temps des watche-watcha que l'on assaisonnera à toutes les sauces. A Andapa (...), un groupe, simplement baptisé Cascades d'Andapa, s'autoproclame roi du "watchawatcha kungfu" ou "dumb". Selon la pochette de son disque sorti en 1977, il s'agit "d'une danse africaine très rythmée qui se fait à deux. Il fut dansé pour la première fois à Nossi-Bé par des marins débarqués. A Andapa, tous les jeunes le dansent avec succès fracassant..."(sic). Mais il y a également le séga watcha ou sigaoma dans la région Sofia, lequel donnera naissance, plus tard, à deux branches majeurs du salegy : le bahoejy et le malesa" (pp. 40).
Dédesse, tout comme Jaojoby Eusèbe et les autres ambianceurs d'Antsiranana,délaissent progressivement le rhythm and blues pour le salegy. Dédesse sortira encore "Samia Mamisavisa", un rock aux confluents de The Police et de Dire Straits avec des relents de "Video killed the radio stars" (The Buggles). Mais désormais, il ne jure plus que par le salegy, même si le titre de roi sera ravi par Jaojoby.
"Tsara ny rythme reggae, fa tsy ambanin'izany ny salegy", chante-t-il dans "Ny Aty", qu'il sort en 1986 avec le groupe Zanatany. Lui qui a fait une incursion dans le reggae avec "Hafatra" en 1976. Ses salegy les plus connus sont sortis essentiellement avec le groupe Zafin'Antsiragnana.
La suite est connue. Reste, toujours dans le registre avant-gardiste, ses interpellations sur la fin du communisme et de l'apartheid, la défense de l'environnement, les guerres civiles, les pandémies, les chauffards dans "Samia Mamisavisa", un tour du monde des actualités, des années avant "Inona no vaovao manerana ny tany" de Ry Sareraka.
"Samia Mamisavisa" marque d'ailleurs son engagement dans la religion. Ce qui explique son absence scénique pendant des années. Dédesse se contentait alors de libérer dans l'art la générosité qu'il n'avait pas au quotidien en composant pour les autres.
Mamy Gotso, le pionnier du rapiky (tsapiky-rap) se souvient : "j'ai eu le privilège de pouvoir le côtoyer. Je me souviens du jour où il a composé sous mes yeux et de mon défunt de beau frère Tida Raphaël la chanson "Jerijery", l'hymne officiel du festival Jerijery de Vavatenina. En 45 minutes top chrono, le mec a sorti cette belle chanson que nous connaissons tous".
"'Zahay koa mihilagna, 'nareo koa sahiragna", chantait encore Dédesse. Il peut partir en paix, le salegy est entre de bonnes mains avec ses héritiers directs, Francisiko "Salama Meva", Jean Rigo ou encore Dadi Love, tout comme les chantres du salegy hardore, Wawa en tête.
Randy D.
6 novembre 2022
(1) Boeny Zakia, dont les droits d'auteur ne finissent de créer la polémique.
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25/04/2022
Le Grand Remplacement est-il véritablement une réalité en France ?
Le grand remplacement est une théorie du complot d'extrême droite introduite en 2010 par l'écrivain français Renaud Camus, un homosexuel qui fait l'apologie de la pédophilie. En reposant sur des principes xénophobes et racistes, il affirme qu'il existerait en France un processus de substitution de la population française et européenne par une population non européenne, originaire en premier lieu d'Afrique subsaharienne et du Maghreb. Ce processus conduirait à un changement de civilisation soutenu, voire organisé, par une élite politique, intellectuelle et médiatique qualifiée de « remplaciste », qui maintiendrait à ce sujet une conspiration du silence et serait motivée pour ce faire par l'idéologie ou par l'intérêt économique.
La théorie du Grand Remplacement ne résiste pas aux statistiques. Il n'y a que 10% d'immigrés en France et la communauté étrangère la plus importante est constituée par les Portugais, autrement-dit des Européens.
10% de la population totale
En 2021, 7,0 millions d' immigrés vivent en France, soit 10,3 % de la population totale. 2,5 millions d'immigrés, soit 36 % d'entre eux, ont acquis la nationalité française. La population étrangère vivant en France s'élève à 5,2 millions de personnes, soit 7,7 % de la population totale.
Est « étrangère » toute personne résidant en France qui ne détient pas la nationalité française. Un « immigré » est une personne née étrangère à l'étranger et venue s'installer en France pour un an au moins, qu'elle ait acquis ou non la nationalité française par la suite.
Les plus nombreux sont les Portugais
Les Portugais sont les plus représentés (plus de 600 000 personnes), deux fois plus que les Italiens ou les Espagnols. Historiquement, la vague migratoire la plus importante en France est venue d'Italie.
En 2021, la France a délivré 733 069 visas contre 712 317 en 2020, soit une légère hausse de 2,3%. Ce nombre reste très inférieur au total des visas délivrés avant la crise sanitaire. En 2019, la France avait délivré 3 534 999 visas.
Les États-Unis restent le pays qui abrite le plus grand nombre d'immigrés, 49,8 millions, soit un sur cinq, loin devant l'Arabie saoudite et l'Allemagne (12,2 chacun), la Russie (11,7 millions), le Royaume-Uni (8,8), les Émirats arabes unis (EAU) (8,3) et la France (7,9).
Sur le plan religieux, l'islam qui totalise environ cinq millions de fidèles sur un total de 67,1 millions de Français, représente 8 % de la population hexagonale. Une proportion parfois largement surestimée par l'opinion publique.
Il est exagéré de dire que les immigrés "piquent" le job des Français.
Qu'en est-il de la diaspora Malgache ?
La diaspora malgache, estimé à 140 000 avec une forte présence à La Réunion (17000) et à Mayotte (5000), est la première communauté d'Afrique subsaharienne en France devant celles du Sénégal, de la Côte d’Ivoire, du Cameroun ou du Mali, mais loin derrière le Maroc ou l’Algérie.
Avec un ratio de 63% de femmes, soit près de deux femmes pour un homme, l’immigration malgache vers la France est nettement plus féminine que les autres populations immigrées. Cette caractéristique pourrait s’expliquer par l’importance des migrations maritales, le mariage constituant par exemple un motif de naturalisation sur deux.
Les Malgaches de la diaspora française ont un niveau de qualification bien supérieur à la moyenne française (60% de master et doctorat contre un peu moins de 30% en France. 45% pour les migrants d’Afrique sub-saharienne en général). Au niveau socio-économique, on relèvera que le taux de chômage des immigrés malgache est inférieur au taux de chômage moyen des immigrés en France, et que plus d’un tiers de l’échantillon composé dans le cadre de cette étude occupe des fonctions de cadre, professions intellectuelles et libérales.
Les Malgaches de la diaspora en France se mobilisent déjà au niveau individuel, notamment à travers les transferts financiers à Madagascar estimé à 86 millions d’euros par l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) en 2013.
Selon une enquête (La Diaspora malagasy en France et dans le monde, une communauté oubliée?) menée par Mireille Razafindrakoto (IRD-DIAL), Nicolas Razafindrastima (INED) Nirintsoa Razakamanana (IRD-DIAL) et François Roubaud (IRD-DIAL), «la diaspora malgache s’inscrit plus que les autres communautés dans une logique individuelle d’intégration dans la société d’accueil», écrivent les auteurs. «Elle est beaucoup plus souvent naturalisée que les autres diasporas (63%).» Par comparaison, seulement 25% des migrants du Mali sont devenus français.
«Les migrants originaires de Madagascar se singularisent donc par leur degré d’intégration à la fois familiale, sociale et spatiale. Cette spécificité explique sans doute leur faible "visibilité" en tant que communauté», concluent les auteurs.
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27/11/2020
Madagascar est en train de se morceler en plusieurs petites îles
Millimètres par millimètres, Madagascar est en train de se diviser pour devenir plusieurs îles indépendants dans quelques millions d'années.
Relevés GPS de surface à Madagascar.
Le continent africain se sépare lentement en plusieurs grands et petits blocs tectoniques le long du système du rift est-africain qui a des répercussions jusqu'à Madagascar qui elle-même se divisera également en îles plus petites.
Le sud et le centre de l'île de Madagascar se déplacent dans deux directions différentes
Une nouvelle étude de la complexe répartition et évolution des plaques tectoniques africaines menée par Sarah Stamps du Département de Géoscience de Virginia Tech et publiée dans la revue "Geology" a conduit à cette conclusion. Pour y arriver, les géologues ont effectué des relevés GPS de surface en Afrique de l'Est, à Madagascar et sur plusieurs autres îles de l'océan Indien. Et ils ont constaté que l'île de Madagascar était en train de se morceler : le sud porté par la plaque Lwandle se détache du reste de l'île tandis que le centre porté par la plaque Somalienne se déplace dans une autre direction.
Une séparation à un rythme de quelques millimètres par an
Le reste de l'île est également sujet à un complexe processus de division qui s'étend jusqu'aux Comores, situées dans l'océan Indien entre l'Afrique de l'Est et Madagascar, et qui s'achèvera par la formation d'archipels. Ce n'est toutefois pas pour les prochaines années... La séparation se fait à un rythme très lent, quelques millimètres par an. Les grands bouleversements prévus n'auront pas lieu avant quelques millions d'années quand l'écartement des terres donnera naissance à de nouveaux océans. En attendant, ce travail permettra de mieux appréhender l'activité sismique et volcanique récente et en cours dans les Comores.
Joël Ignasse in "Sciences & Avenir" du 27 novembre 2020.
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29/09/2020
Les personnes narcissiques seraient plus susceptibles de s'impliquer dans la vie politique
“Les individus qui croient en eux-mêmes, et qui se pensent meilleurs que les autres, s'engagent davantage dans le processus politique”, détaille Peter Hatemi, professeur de sciences politiques à la Penn State University.
Tous les hommes politiques sont-ils narcissiques ? Peut-être bien. Selon une récente étude, publiée dans le Journal of Personality and Social Psychology et Daily Mail, les narcissiques sont davantage susceptibles de s’impliquer dans les activités politiques du pays. Cette nouvelle enquête compile des observations issues de trois analyses différentes. Deux ont été réalisées sur 2 280 et 2 450 participants aux États-Unis et la troisième a été menée au Danemark auprès de 500 volontaires. Dans les trois études, les participants ont été interrogés sur leurs antécédents de vote et leur implication politique : participation à des manifestations ou à des meeting, proximité avec des politiciens ou des médias, dons financiers, etc.
Grâce à ces observations, les chercheurs ont découvert que ceux qui affichaient des traits narcissiques classiques (comme l'égoïsme et le besoin d'admiration) étaient plus susceptibles de signer des pétitions, de contacter des élus et de voter aux élections de mi-mandat que les autres. Les personnes autosuffisantes étaient elles moins susceptibles de s'engager politiquement. Peter Hatemi, professeur de sciences politiques à la Penn State University, estime que ces constatations pourraient expliquer “l'état actuel de notre démocratie”. Et de poursuivre : “Si les personnes qui sont plus intéressées par leur propre gain et leur statut personnel prennent une plus grande part aux élections, alors nous pouvons nous attendre à ce que des candidats qui émergent reflètent leurs désirs”.
© Emile Ralambo
Des opinions partagées sur les réseaux sociaux
Pour parvenir à ces analyses, les chercheurs ont mesuré le narcissisme chez les participants grâce à un questionnaire. Le narcissisme se caractérise par la grandeur, la fierté, l'égoïsme et un manque d'empathie, précise l’étude. Les participants devaient choisir l’énoncé le plus proche de leur personnalité entre, par exemple, “J'insiste pour obtenir le respect qui m'est dû” ou “J'obtiens généralement le respect que je mérite”. Ainsi, ceux qui ont obtenu un score élevé en matière de narcissisme avaient tendance à participer tôt au processus politique en partageant leurs opinions sur les réseaux sociaux. Dans le même temps, les personnes plus autonomes sont également moins susceptibles de prendre part au processus politique.
“Les individus qui croient en eux-mêmes, et qui se pensent meilleurs que les autres, s'engagent davantage dans le processus politique. Cela signifie que les politiques et les résultats électoraux pourraient être de plus en plus guidés par ceux qui veulent à la fois plus et moins donner”, conclut Peter Hatemi, professeur de sciences politiques à l'université de Penn State (États-Unis) et co-auteur de l'étude.
Johanna Amselem in Yahoo Actualités du 29 septembre 2020
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11/02/2020
Assassinat de Ratsimandrava : une affaire à la JFK !
Ratsimandrava intéresse toujours le public !, titrais-je en 2000 à l'occasion d'une exposition sur le personnage qui a drainé plus de 4000 personnes dont 1110 lors de l’inauguration. 45 ans après son assassinat, le 11 février 1975, c'est toujours le même engouement, en raison du mystère qui entoure sa disparition.
Devenu héros national du jour au lendemain de son assassinat, le 11 février 1975, le colonel Richard Ratsimandrava était une de ces personnalités qui ont réussis a coup de persévérance personnelle. D’où certainement aussi l’attrait du personnage.
Renouveau du fokonolona
Comparaison n’est jamais raison. Malgré tout, il est difficile de ne pas faire un parallèle avec le président américain J. F. Kennedy, mort également ans des circonstances non encore élucidées jusqu’à présent. Comme John Kennedy, chantre d’une « nouvelle frontière ». Ratsimandrava, était venu à la barre suprême de l’Etat avec un programme dont les grands points étaient déjà connus du peuple du renouveau du « Fokonolona ». D’autre part, si Kennedy était le premier, et jusqu'à présent unique, président américain non-Wasp (White anglo-saxon protestant), les Kennedy sont catholique, Ratsimandrava était le premier et jusqu'à présent unique, du moins jusqu’à preuve du contraire, chef d’Etat malgache descendant d’ « andevo » (Il parait que le mot « esclave » n’est pas idoine).
L’a-t-on assassiné parce qu’une bande rivale de politicards voulait s’approprier le pouvoir au nom d’un autre programme ? Ou bien là t on éliminé de par son origine sociale ? Certainement les deux à la fois. Mais notre propos n’est pas de révéler ici quelques éléments secrets entourant sa mort. L’histoire s’en chargera bien un jour. Il s’agit juste d’une brève biographie (non autorisée) du personnage, un de ceux que les cours des choses ont transformé en mythes populaires malgré eux.
Citoyens français
Aussi loin que l’on remonte dans sa généalogie, on retrouve une arrière arrière grand-mère dénommé Rampy, morte en 1857. Un de ses petits fils, Maralahy, a laissé un précieux manuscrit ou il relate ses efforts pour sortir de la condition servile à coup de livres. C’est la nièce de Maralahy, Ravelonjanahary, qui donna la naissance à la mère du colonel Richard Ratsimandrava, Rasoanindrina. L’époux de celle-ci, autrement dit le père du colonel, était une personnalité qui à brillé par sa culture. Professeur assistant à l’école Le Myre de Vilers , c’était un féru des livres et d’information. « il possédait une vieille radio branché sur radio Londres ou il écoutait les nouvelles de la Grande guerre. Comme il parlait l’anglais, ils traduisait les nouvelles a ses amis », se souvient la veuve du colonel, Thérèse Razafindramoizana.
Contrairement a son ancêtre Maralahy, qui a espéré mais en vain de se libéré de son statut d’« andevo » par la bible et l’enseignement, Ratsimandrava père a demandé et obtint, la nationalité française. Ce qui lui a permis d’amélioré considérablement sa situation sociale. Ceci explique pourquoi Ratsimandrava ait pu fréquenter le Lycée Gallieni. Passeport indispensable pour des études en France avec, pour lui, direction l’école militaire de St Cyr en 1952.
Conscience communautaire
Séduit par le concept de « déshérités » le père grossi le rang du Padesm. Il fit du journalisme en compagnie des Zafimahova. Richard Ratsimandrava, lui, acquit sa conscience nationaliste, teinté de populisme, lors de ses expériences militaires au sein de l’armée Française. On l’a envoyé pour soumettre les militants anticolonialistes au Maroc (1956) et en Algérie (1958) ou il devient membre du comité de Salut public.
« À l’époque il commandait un détachement de militaires vazaha. Mais en fait, son principal souci était de protéger la population contre les rebelles qui pillaient les villages pour s’approvisionner, un peu comme au temps des Menalamba. C’est là qu’il apprit à connaître le dynamisme des communautés », raconte sa veuve, Thérèse Razafondramoizana, qui poursuivit, « ceci explique pourquoi il a proposé sa médiation lors de la révolte de 1971 dans le sud. Il ne comprend pas pourquoi on s’entre tue entre Malgaches, comme il n’a jamais accepté l’envoi d’une légion étrangère pour mater la révolte. Contrairement a ce qu’on dit, il n’a pas tué des gens dans le Sud.Il a plutôt contribué a sa pacification».
Dans la soirée du 11 février 1975, le cortège qui devait l’escorter après un conseil du gouvernement, à Anosy, s’est arrêté devant sa maison a Anjohy, puis est repartit. « J’ai compris tout de suite. Il y avait surement une embuscade quelque part », à déclaré Thérèse Razafindramoizana. « les jours d’avant, on nous a toujours dit de faire attention », se souvient de son coté une de ses filles, Danielle Ratsimandrava. Ce soir là, l’Histoire accueillit une nouvelle figure de légende, une de plus dans sa collection.
Randy D. in "L'Express de Madagascar" du mercredi 09 février 2000, pp. 10
A voir :11 Fevrier 1975, assassinat de Ratsimandrava. Version complète ici.
A lire : « L’introduction au cahier de Maralahy » par Juliette Ratsimandrava et Fred Ramiandrasoa in « L’esclavage à Madagascar », Actes Colloque international sur l’esclavage, Tananarive, 1996.
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