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11/12/2009

2009 : une crise de l'élite

Pour commencer, une dernière : connaissez-vous la raison de l'extinction des dinosaures ? On les a retenus dans une réserve au Mozambique !

Il ne reste plus que quelques jours avant que ne 2009 rende son dernier souffle. Inutile de regarder en arrière pour constater que 2009 était pour Madagascar une "année spéciale crise". Comme des enfants, ces messieurs qui se disent nos dirigeants (passé, présent et futur) se sont accusés de tous les maux. "Ce n'est pas moi, c'est lui qui a commencé !", affirme l'un. "Non, c'est lui. Il ne veut pas rendre mon jouet. C'est lui le responsable", retorque l'autre. Ces guéguerres de récré comme dans une classe de Maternelles est illustratif du fait que la crise cyclique que traverse Madagascar depuis 1972 est avant tout une crise de l'élite.

Société civile démissionnaire, média incapable d'assurer correctement son rôle de 4è pouvoir, dirigeants qui se servent dans la caisse de l'Etat depuis 1960 - le plus gros hold-up du siècle, un nombre restreint de familles qui monopolise les deux mamelles de la République (finances et politiques)... Les "avara-pi" (intellos) sont finalement les principaux fossoyeurs de la démocratie à Madagascar. Surtout ne pas dire que la crise de 2009 est la cause de la pauvreté de Madagascara alors qu'elle n'en est qu'une conséquence. La principale raison se trouve dans nos pauvres têtes. Jacques Morisset.jpg

Une intéressante étude,"Pour que la terre tourne... aussi à Madagascar : vers un agenda de relance économique", soumis par Jacques Morrisset, économiste de la Banque mondiale, éclaire encore mieux sur les raisons du retard économique de Madagascar depuis l'indépendance. J'en publie en bas des extraits. La version complète est ici.

Depuis 1980, il n'y a que 7 pays en développement qui ont reporté une croissance de leur revenu par habitant moindre que Madagascar, et encore tous ces pays ont souffert de guerres (civiles et régionales) de longue durée.

Une simple comparaison avec l'Ile Maurice suffit à illustrer que l'écart du revenu par habitant entre ces deux pays est passé de 2,7 en 1980 à plus de 15 en 2008. L'écart se creuse également avec le reste de l'Afrique qui ne se caractérise pas non plus par son succès. Le déclin économique de Madagascar n'est donc pas un phénomène récent ; il s'est simplement précipité avec la crise politique qui a éclaté au début 2009.

Les causes du déclin économique malgaches sont donc à rechercher dans des facteurs et comportements structurels et pas seulement conjoncturels.

Au cours de ces dernières années, Madagascar a entrepris un certain nombre d'efforts sur ces deux canaux de la gouvernance. Cependant, ces efforts ont été incomplets, menant à une tension de plus en plus grande pour aboutir à la crise politique du début 2009, qui doit être interprétée avant tout comme une crise de gouvernance. En effet, les bailleurs de fonds avaient interrompu leur aide budgétaire en décembre 2008 à la lumière de la mauvaise utilisation des fonds publics et du non-respect des procédures budgétaire pour l'achat de l'avion présidentiel de 60 millions de dollars ainsi que des exonérations fiscales accordées aux entreprises du Président Ravolomanana. En fait, à la fin de l'année 2008, il était reporté que 4 malgaches sur 10 n'étaient pas satisfaits de la manière comment fonctionnait la démocratie dans leur pays (Enquête Afrobarometer, 2009)

La crise politique actuelle n'est pas indépendante des nombreux dérapages qui se sont accumulés en matière de gouvernance au cours de ces dernières années à Madagascar.

La prépondérance de l'Exécutif n'est pas un phénomène nouveau à Madagascar, mais il s'est accéléré au cours de ces dernières années à travers une série de mesures dont les plus visibles sont rappelées ci- dessous.

- Le budget de la Présidence s'est multiplié par 10 entre 2003 et 2008, passant de 10 milliards à 133 milliards d'Ariary. Cette hausse illustre non seulement le poids grandissant de la Présidence dans le budget mais aussi dans les prises de décisions économiques. Cet interventionnisme est devenu aussi apparent à travers le nombre de conseillers qui s'est multiplié au sein de la Présidence au détriment des circuits institutionnels de décision.

- Les conflits d'intérêt se sont aggravés au cours du temps, jusqu' à la suspension de l'appui budgétaire en décembre 2008 à cause du manque de transparence quant à l'achat de l'avion présidentiel avec les fonds publics et l'usage abusif d'exonérations fiscales pour les entreprises appartenant au Chef de l'Etat.

- La présence dans le cabinet et à la direction des agences de l'Etat du personnel dirigeant des sociétés privées appartenant au Chef de l'Etat.

- Le contrôle du pouvoir législatif par le parti présidentiel s'est accentué, jusqu'à que ce dernier détienne 82% des sièges de l'Assemblée nationale après les élections législatives de 2007. Cette mainmise faisait suite à la dissolution de l'Assemblée par décret en 2007 et à la modification controversée de la loi électorale qui a réduit l'importance des régions les plus peuplées et traditionnellement favorables à l'opposition dans les listes électorales.

- Le remplacement des provinces par les régions, qui s'inscrivait en principe dans un effort d'accélérer et de rationaliser les processus de décentralisation politique et budgétaire, mais qui a mené à une centralisation politique car les chefs de régions ont été directement choisis par le Chef de l'Etat.

La concentration du pouvoir politique et économique autour de la Présidence s'est trouvée exacerbée par le nombre limité de personnes et de familles qui composent l'élite ou l'aristocratie politique dans un pays comme Madagascar. Les réseaux sont existants, façonnant les relations entre les agences gouvernementales, entre le pouvoir exécutif et législatif, et entre le secteur public et privé. A titre d'exemple, il peut être montré qu'une dizaine de familles détiennent traditionnellement les postes les plus importants au sein de la Banque centrale, les banques commerciales et le Ministère des Finances. Une remarque néanmoins s'impose : la concentration du pouvoir autour du Président Ravolomanana s'est en partie faite au détriment de cette élite traditionnelle, politique et financière, qui s'est ainsi trouvée de plus en plus frustrée, provoquant une partie des réactions qui ont mené à la crise politique.

A terme, les inégalités économiques, surtout lorsque la concentration du pouvoir s'accentue de plus en plus et les systèmes de recours n'existent pas, conduisent aux ruptures brutales qui caractérisent la vie politique à Madagascar. Ces ruptures se manifestent parfois à travers des coups d'Etat, parfois la résistance civile. Dans tous les cas, elle précipite le pays dans une grave crise économique, avec une hausse de la pauvreté et de la vulnérabilité.

Mendiant.jpg

La crise tarde à trouver une issue car l'équipe de Andry Rajoelina est composée de mendiants et autres kleptocrates qui vivent, par le biais de la politique, au crochet des aides étrangères. Voilà pourquoi, au lieu de garder tout seul le ballon et foncer droit au but tout seul comme un grand, le gouvernement de la Transition a vite capitulé face aux exigeances des bailleurs de fonds pour un "retour à la constitutionnalité" (?) Jacques Morrisset explique cette promptitude à flatter la croupe des bailleurs de fonds et éviter ainsi de se faire botter le cul par une raison : les aides extérieures sont des "mannes" dans un désert de moralité ou chacun cherche à s'enrichir sur le dos de nos enfants, ceux qui vont rembourser les emprunts dans 50 ans.

L'aide étrangère est en partie perçue comme une « manne venue du ciel », à savoir que l'argent ne vient pas directement de la poche des contribuables ce qui affaiblit leur devoir de vigilance. Ce comportement est encore plus vrai lorsque l'aide prend la forme de dons. Dans ces conditions, les décideurs politiques ne sont pas seulement faiblement redevables par rapport à leurs constituants mais ils sont encore encouragés à limiter les flux d'information et à affaiblir les organes internes de contrôle. A nouveau, la faiblesse des systèmes d'information et de contrôles est manifeste à Madagascar ce qui donne un certain poids à cet argument.

Il peut aussi être argumenté que les bailleurs de fonds ont manqué à leur devoir de vigilance à Madagascar, notamment en matière de leur appui budgétaire.




24/02/2009

Le cache-sexe des Légalistes

Il y a des moments où on aimerait bien remonter le temps pour que certains ratages ne le soient pas. Certains ont changé un destin personnel et, chemin faisant, celui d'une Nation. Parfois dans le mauvais sens. Par exemple, si Hitler aurait été reçu à l'Académie des Beaux-Arts, il serait resté un aquarelliste qui aurait juste caricaturé les Juifs dans ses tableaux au lieu de les gazer. Si Marc Ravalomanana aurait réussi son Bepc, il aurait pu continuer ses études et faire une carrière pépère dans l'administration avec un diplôme non honoris causa au lieu de se venger sur un système qui lui a opposé un obstacle. Hitler a fait de la prison, où il a mûri sa philosophie politique, avant de prendre le pouvoir d'une manière tout à fait légale avec l'approbation de la majorité de l'intelligentsia allemande de son époque malgré le caractère horrible de son projet de société. Marc Ravalomanana a également fait de la prison (et plutôt deux fois qu'une), où sa conviction du pouvoir de l'argent s'est trouvé renforcé, avant de prendre le pouvoir d'une manière tout à fait légale avec l'approbation de l'intelligentsia malgache, qui s'est murée depuis dans un silence complice, malgré l'extrême pauvreté, pour ne pas dire l'absence, d'un projet de société.

Ceux qui n'étaient pas d'accord avec Hitler ont été forcé de s'exiler. Ceux que Marc Ravalomanana n'a pas aimé ont été expulsé. Ils apportaient un éclairage non conforme à la pensée unique nécessaire pour la conquête d'un lebensraum (espace vital) aux frontières élastiques. Le père Sylvain Urfer étaient de ceux là. Il a tiré la sonnette d'alarme dès 2002. Il faisait alors partie de ceux qui ont osé affirmer le mensonge démocratique du "1er tour dé vita" qui a permis à Ravalomanana de faire un hold-up sur le pouvoir avec l'appui de la plèbe de la place du Treize-mai que ses partisans renient actuellement. Sylvain Urfer l'explique noir sur blanc dans son livre "Le doux et l'amer", publié en 2003 aux éditions Foi et Justice.

Sylvain Urfer.JPG



Ce prêtre jésuite lauréat de l'Institut des études politiques de Paris enfonce encore le clou dans un article-bilan de "L'an I de Ravalomanana", paru dans la revue allemande "Der überblick", en 2003.

"Marc Ravalomanana n'a pas été élu sur un programme (qu'il n'avait pas), mais parce qu'une majorité de citoyens ne voulait plus   de     Didier Ratsiraka et qu'il passait pour l'homme capable d'apporter au pays le changement attendu, à savoir la démocratie et la prospérité (...) Au terme d'une première année de pouvoir, Marc Ravalomanana n'a pas dissipé les ambiguîtés sur ses intentions réelles. Le sursaut éspéré ne s'est pas produit, les anciennes habitudes ont repris, et le rédémarragede l'économie sefait attendre. Certes, le discours est toujours moralisateur et pleines de bonnes intentions. Mais la pratique s'en écarte deplus en plus, au profit d'un autoritarisme qui ne tolère pas les divergences, et des décisions qui ne s'encombrent pas des contraintes du droit".

On connaît la suite, le père Urfer sera expulsé de Madagascar manu militari le samedi 12 mai 2007. Rémy Ralibera est également prêtre et jésuite. Heureusement, qu'il n'est pas vazaha. Et pour cause ! Sinon, on l'aurait sûrement déjà aussi expulsé au nom du "Fahamarinana & Fahamasinana" (vérité et sacralité) pour avoir osé fustiger le régime Ravalomanana et les hommes d'Eglise qui ont vendu leur âme au diable dans son autobiographie, "Souvenirs et témoignages malgaches", paru en 2007 toujours aux éditions Foi et Justice.

En 2002, écrit-il, "les chefs d'église du FFKM se Rémy Ralibera.JPGrangèrent du côté des partisans de Ravalomanana qui refusèrent le second tour, sous le prétexte officiel de la lutte pour le respect de la voix des urnes. Cette attitude des chefs d'Eglise divisa déjà les membres du Bureau et des Commissions permanentes. N'ayant pas les données du problème entre les mains, le FFKM n'avait pas à adhérer à un camp ou à l'autre (...) cette inféodation pratique des chefs d'Eglise du FFKM au Président Ravalomanana... n'était pas partagée par toutes les instances du FFKM (les Faritany, les membres du Bureau ainsi que beaucoup de membres des diverses commissions du FFKM, dont en particulier le SEFIP, Sehatrasa ekiomnenika momba ny fiainam-pirenena, Commissionsur la vie nationale). Ce qui a aggravé la situation, c'était cette méthode du président-monarque Raalomanana qui consistait à classer le monde en deux camps : ses amis, donc les bons, et ses adversaires, donc les méchants opposants; il n'y a pas de milieu (...) selon le principe de la présidence tournante, le président du FFKM de décembre 2005 à décembre 2006 fut le pasteur FJKM Lala Rasendrahasina, conseiller technique de Ravalomanana (qui est lui-même vice-président de l'église FJKM). La situation ne s'en est pas trouvé améliorée".

De 2002 à 2009, beaucoup d'eaux sont passés sous le pont de Fatihita dont on demeure encore dubitatif sur les responsables de son dynamitage. Ce qui est sûr est que Marc Ravalomanana a failli sur son projet de société : "minoa fotsiny ihany" (croyez simplement).

On le croyait bâtisseur. Il na construit que des routes dont les financements était bouclés par le gouvernement de Tantely Andrianarivo. Boulevard de l'Europe ne saurait mentir.

On le croyait bon gestionnaire, la suspension des aides par Bretton Woods, l'Union européenne et tout le reste depuis décembre 2008, c'est-à-dire bien avant le cyclone Andry TGV, est une preuve irréfutable qu'il est tout, sauf un adepte de la bonne gouvernance.

On le croyait démocrate. La nouvelle loi sur les partis qui interdit la candidature des indépendants et qui soumet l'existence des partis politiques à son bon vouloir est une manière de dire qu'il s'apprête à mourir au pouvoir.

Et Jean Passe.

Tout ceci explique la nécessité d'une Transition. Pour remettre le compteur à zéro et réécrire les règles du jeu politique. Pour qu'à l'avenir, le peuple ne sera plus obligé de descendre dans la rue pour réclamer un changement. Car il y a des cas, comme dans la situation actuelle, où les lois sont écrites de sorte que ceux au pouvoir y sont boulonnés pendant un bon bout de temps avec l'aide de certains militaires dont les bruits de bottes résonnent d'espèces sonnantes et trébuchantes. Il y a des situations où les voix doivent sortir de l'urne pour se faire entendre.

L'Electoralisme est le cache-sexe des Légaliste. J'espère l'avoir mis a nu ci-dessus. Mais cachez plutôt ce sexe que l'on ne saurait voir. Il n'a servi qu'à baiser la Nation.