17/09/2022
A la découverte d'Ambalavao-Tsienimparihy...
Le hasard fait bien les choses. Un ennui technique m'a obligé de m'arrêter à Ambalavao-Tsienimparihy, une localité que l'on traverse généralement sans trop y prendre garde. Bien m'en a pris car ce séjour forcé m'as permis de constater qu'Ambalavao est un endroit qui recèle de nombreuses curiosités touristiques.
Pour ceux qui font la montée du massif de l'Andringitra, dont la forêt humide fait partie du patrimoine mondiale, Ambalavao est juste une étape avant de gravir le deuxième sommet de Madagascar, pic Bobby ou Imarivolanitra avec ses 2658 mètres. Haja Ratsimbazafy, grand reporter de la TVM, a déjà parlé aussi d'un des patrimoines d'Ambalavao : les motifs géométriques des varangues des maisons traditionnels. Mais Ambalavao mérite mieux. La ville peut devenir une destination culturelle à elle seule. Retenons deux sites intéressants à plus d'un titre. Suivez le guide !
La route de la soie
Ambalavao est une petite ville traversée par la route nationale n°7. A Ambalavao, une partie de celle-ci est bordée d'ateliers artisanaux de production des "lamba landy", tissus fabriqués à partir de la soie. Le tissu de soie est considéré comme celui de la noblesse. Voilà pourquoi on l'utilise pour envelopper les morts, auxquels on doit un respect princier.
Sachez alors qu'à part l'Imamo et la route d'Ambositra, il existe une troisième forêt de tapia (uapaca bojeri) : dans l'Isalo. C'est de là que viennent les cocons de soie sauvage que l'on travaille à Ambalavao. Sinon, les soies d'élevage sont produitent localement. Inutile de dire que les "lamba landy" fabriqués à partir de la soie sauvage est plus chère, beaucoup plus chère !
Les différentes étapes de transformation de la soie.
Nous avons invité un de ces ateliers artisanaux. Tout est fait à la main, de la préparation de cocons aux tissages. Le démêlage manuel de la soie est une technique qui s'acquiert au bout de plusieurs années, de même que l'utilisation du métier à tisser. D'autre part, tout est bio, même les couleurs. Le rouge provient du nanto (Sapotaceae),le vert du dingadingana (psiadia altissima) ou de la grenadelle, le jaune du curcuma, l'ocre de la cannelle, le marron de l'eucalyptus, le noir également de l'eucalyptus, mais aussi de l'argile, le gris foncé de la racine de nymphéa et le violet claire de la betterave ou de l'aloé.
Papiers antemoro
En composant "Les P'tits Papiers" pour Régine, Serge Gainsbourg en a oublié un : les papiers antemoro. Comme son nom l'indique, ces derniers sont historiquement originaire du Sud-Est. C'est avec que l'on a écrit les fandraka (livres) écrits avec le sorabe qui a fait sortir Madagascar de l'Antiquité. Depuis 1936, Ambalavao est devenu un des principaux producteurs de papiers antemoro depuis qu'un "vazaha" en a installé un atelier de transformation. La matière première, l'écorce du havoha, une variété de mûrier, provient toujours du Sud-Est, mais on peut en trouver un planté devant l'atelier.
L'atelier de production de papiers antemoro se trouve au sein de l'hôtel "Les Bougainvillées". Maria se fera le plaisir de vous initier à sa fabrication. Un tour à la boutique s'impose après la visite.
Après la visite, à pieds, des ateliers de transformation de soie et de papiers antemoro, on peut avoir soif. Il suffit d'aller à Morafeno, un quartier situé à l'entrée d'Ambalavao. On y trouve plusieurs magasins proposant plusieurs variétés de boissons traditionnelles. Essentiellement du vin (Ambalavao en est un des principaux producteurs à Madagascar) et du rhum que l'on arrange à toutes les sauces.
.
Depuis un certain temps, Morafeno est devenu un halte obligatoire pour les usagers de la RN7
Bonne route ! Et n'oubliez pas de vous arrêter à Ambalavao...
Randy
Dernière curiosité : la plus petite mosquée de Madagascar se trouve à Ambalavao.
13:37 Publié dans Edito, Voyage | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : tourisme, randy donny, ambalavao, lambalandy, soie, papiers antemoro | Facebook
16/06/2022
Bigflo & Oli : rendez-vous en terrain connu
Oli (du duo Bigflo & Oli) était l'invité de l'émission "Rendez-vous en terre inconnue", diffusée sur France 2 le 14 juin 2022. La terre inconnue était Madagascar, plus précisément la région Vezo. Après l'émoi et la fierté de voir son pays à la Une pour autre chose que la misère et les scandales politiques, rapide debriefing.
Madagascar n'est pas tellement une terre inconnue pour les habitués de l'émission car l'acteur Thierry Lhermitte était déjà dans la région de Maroantsetra dans le cadre de la même émission en 2004. Sinon, la pérégrination d'Oli arrive à point nommé pour rebooster le tourisme malgache, mis à genoux par l'épidémie de covid-19.
Ebloui par le bleu de la mer et revigoré par le souffle marin, lui qui a besoin d'un grand bol d'air tous les matins en raison d'un poumon défectueux, Oli annonce vouloir retourner à Madagascar dès que possible. Peut-être avec son frère Bigflo cette fois-ci.
Et bien, on leur conseille de consulter Orelsan qui était déjà venue plusieurs fois à Madagascar (car mariée à une Malgache) et qui connaît donc les petits coins sympas de cette ville connue et inconnue à la fois, Antananarivo, la bien nommée capitale du pays, la ville des mille découvertes. Espérons qu'Orelsan aura, cette fois, le temps de les conseiller après les avoir laissez tomber pour un duo par "manque de temps". D'où la pique dans "La Vraie Vie" ("Dans ce milieu j'ai été très déçu, j'te l'dis tout d'suite/Comme la fois où Orelsan nous a refusé l'feat/Pourtant il sait combien on l'aime/Allez, sans rancune, mais un peu quand même").
Le passage de "Rendez-vous en terre inconnue" où Oli fait découvrir le rap à une famille de pêcheur Vezo est sympa et fait sourire à la fois. Mais passons. Juste pour dire que le rap et la culture hip hop est une terre bien connue des Malgaches. Un film sur l'historique du rap à Madagascar par Odilon Lamtah Tsibeny, originaire justement du pays Vezo ("Madagascar Hip Hop evolution, from scratch..scratching..to the mainstream") était à l'affiche d'un festival en Italie : le Hip hop cine fest. A défaut de voir le film, pourquoi ne pas regarder des clips de rappeurs malgaches. Da Hopp sur la place depuis la fin des années 90 et fait déjà figure de old. Mais il y aussi ça et ça. Entre autres, bien sûr.
Alors, Bigflo et Oli, prêts pour, cette fois-ci, un rendez-vous en terrain connu ?
En tout cas, merci pour les strophes sur Madagascar dans "J'étais pas là" : "J'ai rencontré un peuple à Madagascar/J'ai appris à pêcher et à faire des nœuds/J'ai compris que finalement, j'étais comme eux/Que j'avais pas besoin de grands choses pour être heureux".
00:58 Publié dans Film, Loisirs, Musique, Voyage | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : bigflo & oli, madagascar, france 2, randy donny, rap | Facebook
01/10/2019
Petit guide du Morondava secret
Revenir à Morondava vingt ans après et ne plus trouver son chemin. La capitale du Menabe s'est métamorphosée ! Nosy-Be n'a qu'à bien se tenir. Nosy Kely est en train de rivaliser avec Ambatoloaka et les touristes sont plus cosmopolites avec une présence massive d'Asiatiques. Le gouvernement veut d'ailleurs en faire une destination internationale. Sea, food & sun. Suivez le guide !
Les baobabs sont amoureux
On connaît tous l'Allée des baobabs où les touristes aiment bien se prendre en photos et admirer le lever et le couche du soleil. Pourtant, en poussant un peu plus loin, on peut voir une autre curiosité de la région : le baobab amoureux. En fait, il y en a deux : celui de Mangily (à g.) et celui du Camp Amoureux, dans la forêt de Kirindy (à d.)
Kimony plage
Le dernier must de Morondava est la plage de Kimony. Situé à quelques minutes de la ville, c'est un endroit en plein développement où l'on peut à la fois nager, jouer au foot ou manger les poissons grillés concoctés pas les villageois du coin. Un petit bar se trouve même sur la dune. Un petit paradis pour weekenders.
Plus près des lémuriens
Ceux que la perspective d'une longue randonnée à travers la forêt pour débusquer les lémuriens rebutent peuvent visiter le parc zoologique privé du Kimony Resort. Encore une nouveauté !
Bain de minuit
Pour se reposer un peu des émotions de la journée, il est possible de faire un bain de minuit au Sélect hôtel.
Dites bonjour à Kassim !
Le matin, à l'heure où les boutiques n'ouvrent pas encore, on peut prendre le petit déjeuner dans une... épicerie, celle de Kassim Dabaria, dont les ancêtres sont venus du Gujerat il y a 150 ans. Lui-même en a 80 ! Les sambos sont chauds et le kebab, en fait une boulette de viandes, vaut le détour.
Un air de Kingston
Vous n'étiez pas à Morondava si vous ne faites un tour chez Jean Le Rasta. Cocktail "Ya Man" et croquettes de crevettes à déguster sous les plantes qui poussent à l'intérieur de ce bar-cabaret et sur une musique de Bob Marley. Kingston, à moins que ce ne soit Montego Bay, n'est pas loin...
Taxi !
Morondava est envahi par des centaines de cyclo-pousses et de Bajaj. Au grand désespoir des taxis, il n'en reste plus qu'une douzaine, qui demeurent pourtant les seuls qui peuvent vous emmener sur de longues distances. Appelez Mara (+261 32 83 445 96) ou Tovo (+261 34 08 999 50) qui connaissent les bons plans et chaque nids de poule de la route vers Belo-sur-Tsiribihina.
Randy
01:10 Publié dans Loisirs, Voyage | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : morondava, randy donny, tourisme, baobab | Facebook
10/10/2017
Y a-t-il un chef dans l’avion ?
Ce n’est pas cauchemar en cuisine, mais parfois, c’est cauchemar à 30.000 pieds ! A force de voler dans les airs, l’idée m’est venue de comparer les menus servis à bord où l’excellence alterne avec turbulences.
Voici donc le top chef, ou plutôt top 7 des meals servis à bord des compagnies aériennes avec lesquelles j’ai volé au moins deux fois, sauf pour KLM Royal Dutch.
Ce n'est pas parce qu'on a tout mangé qu'on a apprécié !
Comme dans les concours de cuisine, mettons un peu de suspens en commençant avec la dernière. Bien évidemment, comme les couleurs, on peut discuter de mes goûts.
Le samoussas détient le record du monde de grosseur, mais aussi celui du mauvais goût. Excusez du peu mais c’est dur et ça sent le pétrole. N’en déplaise à MampiraySolofoniaina. Comme la distance entre Johannesbourg et La Caire (et l’inverse) est assez importante, on finit par tout ingurgiter. Mais ceci ne signifie pas qu’on a apprécié.
Lorsque l’hôtesse ou le steward vous dit de choisir entre l’œuf (« egg ») et la poule (« chicken ») n’hésitez pas à choisir la seconde option. L’œuf en question n’a pas de goût, sa consistance fait douter de son origine naturelle et le « beef » (viande de zébu) qui l’accompagne est carrément infecte. Du coup, si une autre fois l’on vous demande si vous voulez du « beef » avec des pâtes, n’hésitez pas : refus catégorique. De quoi devenir végétarien ? Et bien non, ne touchez même pasaux légumes, c’est encore pire ! Heureusement que la confiserie, muffin ou (et surtout) la tarte à l’orange, est une tuerie ! Et le thé, tout droit venu des plantations du Rift Valley, est divin !
Ceci dit, Kenya Airways propose un cure-dent couplé avec un fil dentaire qui s’avère très pratique.
Kenya Airways aurait pu avoir un meilleur classement, mais la différence s’est fait avec le service. Le personnel à bord semble avoir perdu le sourire à jamais et leur caqueterie en cuisine indispose pour peu qu’on soit placé à l’arrière de l’appareil.
Du coup, Turkish Airlines entre directement dans le top 5. Il faut reconnaître que côté quantité, c'est assez appréciable. Et du bon café en plus !
Roulades de jambon (plusieurs !), fromage et confiseries... La compagnie sud-africaine sait gâter ses clients qui le lui rendent bien. Pour traverser le Canal de Mozambique sans trop de nostalgie, c'est agréable.
Parfois, il n’est pas nécessaire d’avoir tout goûté pour avoir une idée de la qualité générale. Entre Amsterdam et Paris, deux mini roulés au fromage ont failli nous amener à dire à la compagnie de prolonger le voyage tellement c’était délicieux. Même l’eau minéral est exceptionnellement rafraîchissant. La compagnie porte bien son nom.
Cela fait un bon bout de temps que je n’ai plus voyagé avec la marque au ravinala, mais ma mémoire gustative ne retient que de bons souvenirs. Un bémol toutefois, les produits servis à bord du « voron-tsara dia » doit être estampillés exclusivement made in Madagascar. Car il me semble que ce n’est pas toujours le cas. Ce qui est dommage pour une compagnie nationale.
La compagnie cocorico fait honneur à la réputation de l’Hexagone. A bord de ses avions, on n’y mange que du bon. Et des produits bien français en plus. Vin, beurre, viennoiserie… Il n’y a rien à dire, on ne risque pas d’y mourir de faim à force d’éviter des aliments immangeables.
Voilà. J’ai aussi voyagé sur d’autres compagnies aériennes, mais à une époque où je n’ai pas encore songé à faire cet exercice de comparaison. Mais si mon palais n’a pas retenu de mauvais souvenirs du vol du SAS Airlines, entre Paris et Copenhague en 2000, ou encore Bulgaria Air, ce que manifestement, j’y ai passé du bon temps… à table.
Randy D.
22:05 Publié dans Voyage | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : madagascar, klm royal dutch airlines, air madagascar, air france, kenya airways, airlink, egyptair, turkish airlines, top chef | Facebook
13/09/2017
Dans ma bibliothèque, quand Tananarive d’hier ne diffère pas de celui d’aujourd’hui
Tâches douteuses et feuilles jaunies. J’adore les vieux livres. Les bouquinistes d’Ambohijatovo le savent car c’est ce que je cherche quand j’y fais un tour. Mais il n’y a pas qu’Ambohijatovo. A Ampefiloha, devant le lycée éponyme, un vendeur de livres d’occasion étale ses marchandises à même le trottoir. « Cela fait fort longtemps qu’il se trouve là», me dit mon chauffeur. Je lui ai déjà acheté plusieurs livres dont un Coran (!). Au vendeur de livres, pas à mon chauffeur…
Cette fois-ci, c’est un vieux bouquin écrit par un certain Pierre Enim en 1929 et publié chez Hachette en 1932. J’ai marchandé, prétextant que « personnes d’autres ne s’y intéresserait, à part moi ». Je culpabilise un peu. Si ça se trouve, c’est peut-être son seul revenu de la journée. Et je me permets de grignoter encore…
Sitôt entré dans ma voiture, je lis le livre d’un seul trait. Comme à mon habitude. Et comme d’habitude, je ne suis pas déçu. J’adore les livres anciens. Ceci est une petite annonce pour ceux qui en possèdent et qui veulent s’en débarrasser.
Pierre Enim est inconnu au bataillon des auteurs « vazaha » ayant écrit sur Madagascar sous la colonisation. Mais c’est vraisemblablement un magistrat ayant exercé à Tananarive et qui a visité Antsirabe. C’est du moins ce qui ressort de ses récits et des amis qu’ils fréquentent.
Dans ce livre, il brosse un portrait sans complaisance d’un Madagascar qui s’avançait par lui-même vers la modernité avec son drapeau, sa littérature et ses ordres de chevalerie, mais dont l’indépendance a été stoppée nette par la colonisation française.
Pierre Enim débarque dans un Tananarive de 800.000 âmes que trente-trois ans d’occupation française dite « vigoureuse » (sic) n’ont pas apportées que le progrès. Les filanzanes ont « disparu de la ville (et) ne sont plus que curiosités de musée et sujets de timbres-poste », mais les rues demeurent toujours poussiéreuses.
« Sur les trottoirs, d’immenses caisses municipales à ordures publiques, caisses sans fond ni couvercle, remplies à toute heure, attendant pendant vingt-quatre heures, à l’air libre, le passage de la charrette collectrice. C’est par nuées, à l’enlèvement, à la pelle, de leur contenu, qu’en sortent mouches vertes et insectes ailées de toutes sortes », écrit-il avant de continuer un peu plus loin : « dans le creux des ruisseaux, l’eau stagne avec des détritus de toutes sortes sans que jamais le balayeur public n’y passe son balai. Celui-ci, d’ailleurs, par la forme plate qu’il a généralement, n’est pas fait pour ce nettoyage-là ».
Si le fantôme de Pierre Enim revient à Madagascar 85 ans après, il constatera que pas grand-chose n’a pas changé de ce côté. Pas plus que dans l’usage du français. Selon lui, « les trois quarts des malgaches du peuple de la ville, jeunes et vieux, non seulement ne parlaient pas le français, mais encore ne le comprenaient pas (…) Vous croyez, vous Français de la Métropole, comme je le croyais, moi-même, avant mon arrivée à Madagascar, que, dans les écoles primaires indigènes, publiques tout au moins, les classes se faisaient en français ? Erreur. Les classes se font en malgache et les pédagogues – des malgaches – sont, pour les neuf dixièmes, complètement ignorants des mots les plus usuels de notre langue. Voilà pourquoi, l’ancien écolier de l’école indigène ne sait parler et écrire que sa langue originelle, le malgache ».
Voilà de quoi apporter de l’eau au moulin des partisans du « fanagasiana ». En tout cas, Pierre Enim n’a pas mis du temps pour comprendre toutes les ficelles du parler (on non) malgache : « Han, han, han » vous répondent-ils quand vous vous adressez à eux en langue de Molière, ce qui signifie, suivant les circonstances : « Je ne sais rien… passez votre chemin… vous m’importunez. »
Réaliste, Pierre Enim se rend à l’évidence : « un pays conquis conservant la langue de ses ancêtres ne sera jamais un pays absorbé par son conquérant ». Mieux : visionnaire, il annonce les prochaines révoltes anticoloniales pilotées par les anciens combattants, ceux qui, en combattant pour la France durant la première guerre mondiale, ont pris conscience que les blancs ne sont pas invincibles. Biberonnés aux discours sur la liberté, l’égalité et la fraternité, ils réalisent à leur retour au pays que tout ceci n’est que coquilles vides à Madagascar.
Pierre Enim est un des rares colons à avoir fustigé l’indigénat. « A l’encontre du droit (j’allais dire du bon sens) il se produit ceci à Madagascar : le Malgaches, enfant de sa terre est, chez lui, un homme sans patrie existante (…) Quoique Gallieni eut dit (J. O. du 3 mars 1897) après avoir déporté sa dernière à la Réunion : « La France vous considère, maintenant, comme ses propres enfants », l’indigène, mis en marge de la patrie françaises, est demeuré indigène, comme si l’indigénat était une nation, un Etat ».
Ainsi, conclut Pierre Enim, « peut-on, allégrement, comme pour un peuple inculte, assujettir à ses lois un peuple civilisé, un peuple conscient, un peuple à histoire et à coutumes ? Ne porte-t-il pas, toujours, au fond du cœur, ce peuple-là, l’amertume de la perte de sa nationalité ? n’y garde-t-il pas, en même temps, la haine de son conquérant, surtout quand ce conquérant a eu la maladresse, au lieu d’essayer de l’assimiler, de le traiter toujours en conquis ? Et n’est-il pas à craindre qu’un beau jour, cette haine-là n’éclate, brutale, sanglante ? (…) Au début de la guerre, après la défaite de Charleroi et la descente, à Bordeaux, du Gouvernement, alors que, dans le monde, on croyait la France perdue, une organisation secrète d’intellectuels malgaches, pour l’autonomie du pays, la V.V.S. (Vy vato Sakelica, Fer et pince sous le bras) n’avait-elle pas déjà commencé à soulever le peuple contre les Européens, ne projetait-elle pas de les faire rejeter du pays ?
L’avenir seul répondra de notre politique, l’avenir, c’est-à-dire la levée de la 2è ou de la 3e génération des Hovas, conquis, et pas plus » .
On verra effectivement par la suite qu’à la tête de la rébellion de 1947 se trouvait des démobilisés d’une autre guerre mondiale, la 2è.
Non, ne nous trompons pas. Comme Laborde, il ne faut pas prendre Pierre Enim comme il n’est pas. C’est toujours un « vazaha » qui pense « vazaha » et qui émet des réflexions dans l’intérêt des « vazaha ».
« Si Madagascar était anglais, belge ou allemand, depuis les trente ans que nous y sommes, il « rendrait » des milliards et compterait une population blanche de quarante mille habitants. Sa population indigène serait d’un chiffre double de son chiffre actuel et sa population métisse d’un chiffre triple », philosophe-t-il.
En 1929, Madagascar comptait 3 millions d’habitants dont 10.000 « vazaha ».
Après la lecture de l’ouvrage de Pierre Enim, on constate que Madagascar fait du sur place depuis un siècle ! Toujours spolié par « des peuples du dehors » (sic) et terrorisé, à l’intérieur, par des « dahalo ».
« Les Tontakelys sont des bandes armées de pillards qui, encore aujourd’hui (1929), dans les régions de l’île non pourvues de postes militaires ou de brigades de police, se ruent dans les villages qu’ils mettent à sac, souvent à sang ».
Comme ce « aujourd’hui (1929) » sonne d’actualité !
Randy
12:58 Publié dans Livre, Voyage | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : madagascar, tananarive, antananarivo, randy donny, colonisation, vvs | Facebook