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28/01/2020

“Qui a peur du HCDDED a peur de la Démocratie et de l’Etat de droit”

Interview paru dans le n° 003, mai 2019, de "Demokrasia", le magazine du HCDDEDHCDED, Randy Donny, Demokrasia, Madagascar

Le Haut Conseil pour la Défense de la Démocratie et l’Etat de Droit (HCDDED) est prévu par la Constitution de 2010. Mais à cause de manipulations politiques, il n’a réellement pu être opérationnel que récemment. Le Haut Conseiller Randy Donny en est le Rapporteur Général. Entretien.

HCDED, Randy Donny, Demokrasia, Madagascar

* Le HCDDED est prévu par la Constitution de 2010. Mais il n’a pu être opérationnel que récemment. Quelles en sont les raisons ?

° Randy Donny : Peut-être parce que le pouvoir en place à l’époque n’aimait pas la Démocratie et l’Etat de droit ? (rires). Non, sérieusement, il y avait effectivement un décalage entre l’élection des membres, en majorité en 2016, et la mise en place effective du HCDDED, en mars 2018. Vous savez, le HCDDED figure dans la Loi des finances dès 2017 ! La raison en est que les tenants du pouvoir, comme c’est souvent le cas, voulaient s’assurer si ce nouvel organe constitutionnel allait les déranger ou pas. D’autant plus que le régime d’alors n’appréciait pas beaucoup certains des membres élus au sein du HCDDED. Fort heureusement, il fallait respecter la Constitution et Iavoloha a finalement sorti le décret constatant l’élection et la nomination des membres du HCDDED un mois avant la grande manif’ des 73 députés en 2018. D’autant plus que le HCDDED a un quota de représentants au sein de la Haute cour de justice. Vous avez remarqué que le retard dans l’érection de la Haute Cour de Justice faisait partie des arguments de requête en déchéance du Président de la République par les 73 députés !

* Ce retard a-t-il entrainé des conséquences fâcheuses sur la réalisation des missions de l’organe ?

° Bien entendu ! La mission du HCDDED est vaste et de longue haleine ! Or, c’est un organe nouvellement créé. Nous en sommes donc les pionniers. Et comme tel, il fallait tout créer : le Règlement intérieur, l’organigramme, le Plan stratégique, sans parler de l’administration et de la logistique... C’est basique, mais c’est nécessaire pour la pleine réussite de la mission. Comme tout organe, il faut du temps pour que le mécanisme soit bien huilé. C’est à l’image de la Démocratie : rien n’est parfait d’avance, c’est un système en permanente construction.

* L’organe a-t-il les moyens de ses ambitions ?

° Je dirais que non ! Le HCDDED a un budget tellement riquiqui que plus de la moitié est absorbé par les dépenses de fonctionnement ! D’autre part, nous avons hérité d’un hangar désaffecté en guise de siège et nous en sommes encore en plein travaux de réhabilitations. Il fut un moment où on n’avait même pas d’endroit pour se réunir.

* Comment travailler dans ces conditions ?

° Le système D comme débrouille et la bonne volonté de chacun des membres ! Par exemple, le HCDDED, tout organe constitutionnel qu’il est, ne dispose pas de voitures. Alors, chaque membre utilise la sienne propre pour les déplacements. Heureusement que chacun en a avant d’être élu au HCDDED d’ailleurs ! Il en est de même pour les moyens de communication... Personnellement, pour mes réunions de staff, j’emmène mon équipe dans le café d’une station-service et on y travaille tout en passant du bon temps !

* Pourtant, le chantier de la Démocratie, l’Etat de droit et les droits de l’Homme est aussi vaste que le territoire de Madagascar.

° Oui. Le problème est que les gens ne réalisent pas encore très bien l’importance de la Démocratie, de l’Etat de droit et les droits de l’Homme dans le processus de développement. D’où les faux débat récurrents sur ce sujet. D’un autre côté, la balance des pouvoirs, ce que les Américains appellent check and balance, n’est pas encore bien comprise à Madagascar. Chaque pouvoir cherche en permanence le moyen d’avoir la primauté sur les autres. Dans ce cadre, le HCDDED, qui a pour mission d’y mettre le holà est un peu perçu comme un cheveu dans la soupe ! Alors, on le laisse dans le dénuement pour qu’il ne grandisse pas trop vite.

* Quelle est donc la priorité de l’organe pour le moment ?

° Personnellement, je suis un peu réticent à émettre un classement de priorités car tout est prioritaire ici en ce moment ! Tout doit être traité en urgence tant la déconstruction a pris du terrain à Madagascar : la discipline, la bonne gouvernance, la corruption... Je vais vous dire une chose : selon une étude de l’International Country Risk Guide, il faudra 12 à 20 ans pour redresser la qualité de l’administration à Madagascar, 14 à 27 pour éradiquer la corruption et 10 à 17 ans pour améliorer la sécurité et la politique !
Heureusement que le Malgache a bon dos. Cela peut étonner mais l’espérance de vie à Madagascar est plus longue, 65,5 ans, qu’au Rwanda, 64,5 ans, et même en Afrique du Sud, 57,4 ans.

Ceci dit, le HCDDED est composé de quatre commissions : Commission de Défense des valeurs démocratiques et de l’éthique politique, Commission de Défense de l’Etat de Droit, de la Bonne Gouvernance et de l’harmonisation des lois avec les instruments internationaux, Commission de Contrôle, de la Promotion et de la Protection des droits de l’Homme et Commission de l’information, Education, Communication et des Relations avec les Institutions. Chaque commission traite les plaintes et autres doléances correspondantes à sa mission, nous en recevons régulièrement au quotidien, mais le HCDDED peut également faire une auto-saisine sur un sujet le cas échéant.

* Vous faites partie du 4ème pouvoir, car vous êtes le représentant de l’ordre des journalistes au sein de l’organe. Quel est l’apport que vous pouvez emmener au sein du HCDDED ?

° La vision large et globale d’un journaliste ! La défense de la pluralité également, que ce soit d’opinions, de genres ou d’informations. Je me suis toujours insurgé contre l’injustice et les manipulations. Ce qui m’a parfois valu des problèmes vis-à-vis de mes supérieurs hiérarchiques quand j’exerçais encore mon métier de journaliste au quotidien. Dans ce cas, je préfère faire valoir ma clause de conscience, quitte à ne pas avoir de travail !

* En s’érigeant en tant que balise, n’avez-vous pas peur de représailles ou de censure, notamment de la part de l’administration ?

° Qui a peur du HCDDED a peur de la Démocratie et de l’Etat de droit et donc d’un développement harmonieux, inclusif et durable. Et puis, pourquoi doit-on toujours se méfier les uns les autres ? Que chacun fasse son travail comme il faut et les vaches seront bien gardées tout en regardant le train du développement passer à vive allure !

Propos recueillis par Solofomiandra Razanatsoa

HCDED, Randy Donny, Demokrasia, Madagascar

 

23/11/2019

Bataille sur les Iles éparses : Une raison économique avant tout

J'ai ouï-dire que le gouvernement malgache fait une consultation populaire concernant les îles éparses. Cela tombe bien, je viens de donner mon avis dans "Midi Madagasikara". Entre autres sujets...

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Journaliste et Rapporteur Général du Haut conseil pour la défense de la démocratie et de l’état de droit (HCDDED), depuis 2018, Randy Donny nous livre ses impressions sur certains sujets brûlants dont la bataille sur les Iles éparses où la question économique occupe une place importante. Interview.

° Question : L’événement de cette semaine aura été les négociations autour des Iles éparses. Quelle lecture vous en faites ?

* Randy Donny : Ce n’est qu’un début. C’est comme un combat de boxe. Il y aura certainement plusieurs rounds. Ne croyez pas que la France va lâcher facilement les Iles éparses, même si elle sait pertinemment qu’elle n’a aucun droit de les garder. Il y a une raison économique : les Iles éparses recèlent 3 à 5 milliards de m3 de gaz et 6 à 12 milliards de barils de pétrole. Il y a aussi une raison stratégique : les Iles éparses se trouvent dans le canal de Mozambique qui voit passer 30% du trafic mondial des pétroliers, sans parler des porte-conteneurs. Enfin, il y a une raison géopolitique : les îles éparses représentent 630.000 km2 de zones économiques exclusives de la France, la deuxième plus vaste du monde. Lâcher les Iles éparses équivaut donc pour la France à s’amputer d’une grande partie de sa superficie.

Ceci dit, Madagascar dispose d’un argument choc pour le retour des Iles éparses en son sein : la résolution des Nations Unies de 1979 qui “invite le Gouvernement français à entamer sans plus tarder des négociations avec le Gouvernement malgache en vue de la réintégration des îles précitées, qui ont été séparées arbitrairement de Madagascar“. J’estime que cela ne souffre d’aucune interprétation : les Iles éparses appartiennent bel et bien à Madagascar. Le décret français de 1960, qui a séparé “arbitrairement” les Iles éparses de Madagascar, ne peut être opposable ni à Madagascar, un Etat indépendant, ni à la Résolution des Nations Unies qui “réaffirme la nécessité de respecter scrupuleusement l’unité nationale et l’intégrité territoriale d’un territoire colonial au moment de son accession à l’indépendance”. L’Onu demande donc à la France ” de rapporter les mesures portant atteinte à la souveraineté et à l’intégrité territoriale de Madagascar et de s’abstenir d’en prendre d’autres qui auraient le même effet et pourraient affecter la recherche d’une solution juste au présent différend“. Autrement dit, le débat sur la licéité de la souveraineté française  sur ces îles n’a plus lieu. La France veut seulement gagner du temps et chercher une porte de sortie honorable. C’est de bonne guerre, elle défend ses intérêts envers et contre tout. Ce que doit aussi faire Madagascar qui ne doit pas non plus céder d’un pouce. Le contraire serait faire preuve d’une légèreté avec des conséquences fâcheuses sur nos relations avec l’Onu qui nous apporte les Iles éparses sur un plateau d’argent. Après tout, si on n’est pas capable de gérer 43,2 km2, comment peut-on prétendre pouvoir développer 590.000 km2 ?

° Vous êtes membre du Haut conseil pour la défense de la démocratie et de l’état de droit (HCDDED), lequel est consignataire d’un communiqué conjoint, le 18 octobre 2019, recommandant l’arrêt du projet à Ambohitrimanjaka. Pourquoi cette décision ?

* Tout d’abord, il ne s’agit pas d’un arrêt définitif, mais juste d’un stand-by, le temps d’aplanir les différends. Les cosignataires du communiqué ne sont pas contre le projet Tanamasoandro. Ils sont simplement soucieux d’état de droit, de “fihavanana” et de droits humains. Personnellement, j’ai déjà préconisé l’aménagement du Betsimitatatra en ville nouvelle dès 2005 (c’est sorti dans un journal et sur mon blog, c’est facile à vérifier), mais il faut le faire dans les règles de la bonne gouvernance. En France, pour moins que ça, on a abandonné le projet d’aéroport à Notre-Dame-des-Landes et récemment, l’arrêt du projet EuropaCity qui aurait dû pourtant attirer 30 millions de visiteurs par an !

° Le président Andry Rajoelina a inauguré le premier KFC implanté à Madagascar. Ceci a été diversement interprété. Qu’en pensez-vous ?

* Je présume que la décision “d’envoyer” le président de la République inaugurer un fast-food était une décision mûrement réfléchie par ses conseillers. Cela rehaussera-t-il son image ou pas ? J’imagine la Présidence disposer d’un bataillon de coachs en communication, de spin doctors et autres storytellers qui contrôle ses moindres faits et gestes, comme cela se fait partout ailleurs.

Ceci dit, il faut savoir que ce KFC là fait partie d’un important groupe qui participe activement à l’essor économique du pays en générant des centaines d’emplois; même si, dans l’opinion publique , le KFC, c’est juste du bling-bling.

Propos recueillis par R.Edmond.

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01/10/2019

Petit guide du Morondava secret

Revenir à Morondava vingt ans après et ne plus trouver son chemin. La capitale du Menabe s'est métamorphosée ! Nosy-Be n'a qu'à bien se tenir. Nosy Kely est en train de rivaliser avec Ambatoloaka  et les touristes sont plus cosmopolites avec une présence massive d'Asiatiques. Le gouvernement veut d'ailleurs en faire une destination internationale. Sea, food & sun. Suivez le guide !

Les baobabs sont amoureux

Morondava, Randy Donny, tourisme, baobab

On connaît tous l'Allée des baobabs où les touristes aiment bien se prendre en photos et admirer le lever et le couche du soleil. Pourtant, en poussant un peu plus loin, on peut voir une autre curiosité de la région : le baobab amoureux. En fait, il y en a deux : celui de Mangily (à g.) et celui du Camp Amoureux, dans la forêt de Kirindy (à d.)

Kimony plage

Morondava, Randy Donny, tourisme, baobab

Le dernier must de Morondava est la plage de Kimony. Situé à quelques minutes de la ville, c'est un endroit en plein développement où l'on peut à la fois nager, jouer au foot ou manger les poissons grillés concoctés pas les villageois du coin. Un petit bar se trouve même sur la dune. Un petit paradis pour weekenders.

Plus près des lémuriens

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Ceux que la perspective d'une longue randonnée à travers la forêt pour débusquer les lémuriens rebutent peuvent visiter le parc zoologique privé du Kimony Resort. Encore une nouveauté !

Bain de minuit

Morondava, Randy Donny, tourisme, baobab

Pour se reposer un peu des émotions de la journée, il est possible de faire un bain de minuit au Sélect hôtel.

Dites bonjour à Kassim !

Morondava, Randy Donny, tourisme, baobab

Le matin, à l'heure où les boutiques n'ouvrent pas encore, on peut prendre le petit déjeuner dans une... épicerie, celle de Kassim Dabaria, dont les ancêtres sont venus du Gujerat il y a 150 ans. Lui-même en a 80 ! Les sambos sont chauds et le kebab, en fait une boulette de viandes, vaut le détour.

Un air de Kingston

Morondava, Randy Donny, tourisme, baobab

Vous n'étiez pas à Morondava si vous ne faites un tour chez Jean Le Rasta. Cocktail "Ya Man" et croquettes de crevettes à déguster sous les plantes qui poussent à l'intérieur de ce bar-cabaret et sur une musique de Bob Marley. Kingston, à moins que ce ne soit Montego Bay, n'est pas loin...

Taxi !

Morondava, Randy Donny, tourisme, baobab

Morondava est envahi par des centaines de cyclo-pousses et de Bajaj. Au grand désespoir des taxis, il n'en reste plus qu'une douzaine, qui demeurent pourtant les seuls qui peuvent vous emmener sur de longues distances. Appelez Mara (+261 32 83 445 96) ou Tovo (+261 34 08 999 50) qui connaissent les bons plans et chaque nids de poule de la route vers Belo-sur-Tsiribihina.

Randy

16/07/2019

Barea de Madagascar : la revanche de ceux que la Fédération voulait virer !

A Rio de Janeiro, les gosses apprennent à jouer au foot sur la plage. A Madagascar, c'est plutôt dans les rizières. En tout cas, c'est ainsi que Faneva Ima Andriatsima a débuté à 5 ans, à Tsaramasay, un des ghettos d'Antananarivo, la capitale. 30 ans après, le capitaine de la sélection nationale emmène l'équipe à accéder pour la première fois à la Coupe d'Afrique des Nations (CAN 2019, Egypte) où il atteint les 1/4 de finale. Retour sur la fabuleuse aventure des Barea, les zébus indomptables.

Madagascar, Barea, Faneva Ima, Nicolas Dupuis, Lova Ramisamanana, CAN 2019, Randy Donny

"On dormait à l'aéroport, il y a le Cameroun avec Samuel Eto'o qui est passé devant nous. J'avais honte ce jour-là." C'est ainsi que Lalaina Bolida Nomenjanahary résume sa vie avec les Barea avant l'aventure CAN 2019. Il y a même un époque où le président ivoirien Gbagbo offrait 500 dollars à chaque joueur malgache en voyant leur dénuement après un match. "J’ai connu le temps où on dormait dans un hangar avec des lits superposés. Et on a fait un nul avec le Sénégal ce jour- là (2- 2, 13 novembre 2015)!", se souvient de son côté Faneva Ima. Ce dernier décide alors de prendre les choses en mains, pour ne pas dire les Barea par les cornes, et lance l'opération CAN 2019.

«Faneva c'est le secrétaire de l'équipe. À chaque fois qu'il y a des trucs à faire, des rendez-vous, des machins... C'est lui qui nous a appelé - les binationaux - pour nous motiver à venir en sélection. Il nous a parlé du projet, avec l'aide du coach bien sûr», témoigne Jérôme Mombris.

Le coach, c'est Nicolas Dupuis. Modeste joueur dans les divisions amateurs, son palmarès inclut toutefois un champion de France Universitaire avec le STAPS Clermont, Nicolas Dupuis est entraîneur-joueur de l' AS Yzeure (CFA) lorsqu'il devient sélectionneur des Barea en 2016.

Désormais, il y aura un avant Dupuis, où "il y avait un quota de quatre ou cinq expatriés. Le reste, c'était des joueurs locaux et comme il n'y avait pas de championnat à Madagascar, c'était compliqué. On ne faisait pas jouer les meilleurs joueurs malgaches".

Eric Rabesandratana, pilier de l'équipe de France Espoirs au milieu des années 90 et capitaine du PSG, s'en souvient : après avoir connu une petite sélection avec Madagascar lors d'un match amical contre Toulouse, "le sélectionneur de l'époque avait décidé de ne plus prendre les binationaux. C'est une déception parce que j'ai demandé la double nationalité à deux reprises. Et à chaque fois, ils ont perdu le dossier."

Puis, il y a l'après Dupuis. Faneva Ima raconte : "J’ai d’abord cherché à savoir qui avait des origines malgaches, notamment chez les Réunionnais. Thomas (Fontaine, défenseur de Reims), ça a été le déclic, c’était après Sao Tomé en 2017 (tour préliminaire des qualifications de la CAN 2019). J’ai parlé au coach des joueurs que j’avais contactés. Il fallait tous les ramener si on voulait réussir un truc. Je lui ai dit de faire revenir Lalaina (Nomenjanahary, Paris FC) et Anicet (Andrianantenaina, Ludogorets, Bulgarie) aussi. Marco (Ilaimaharitra, Charleroi, Belgique), lui, a des parents 100% malgaches. Thomas est arrivé en juin 2017, suivi de nombreux autres. Jérémy (Morel) aussi dernièrement".

A ce duo se joint Lova Ramisamanana qui crée alors l'association Alefa Barea. Le début de son aventure avec les Barea date d'octobre 2017 lors des matchs préparatifs contre l'Ouganda. "Je me souviens que certains joueurs ont dû prendre le taxi toute la nuit, car ils avaient un match de championnat le soir, pour arriver à Roissy à 7h, raconte-t-il. Certains ont dû se battre contre leurs présidents de clubs qui ne voulaient pas les libérer. D’autres ont perdu leur place de titulaire au retour car ont préféré partir en sélection au lieu de rester au club. On a passé toute la nuit au téléphone avec le coach Nicolas Dupuis, Andriatsima Faneva Ima et Hermann De Souza pour bâtir une équipe compétitive. Depuis ce jour là, j’ai vu la motivation, la fierté, le dévouement de nos joueurs pour porter le maillot national et défendre nos couleurs. Nous avons tout de suite enchaîné contre les Comores, le match qui a permis de bâtir l’équipe d’aujourd’hui avec les retours d’Ibrahim Amada, Anicet Abel Andrianantenaina et de Lalaina Nomenjanahary ainsi que l’arrivée de nouveaux joueurs dans la sélection : Jérôme Mombris, Marco Ilaimaharitra et Melvin Adrien. 6 des 11 titulaires des Barea d’aujourd’hui ont donc commencé à jouer ensemble face aux Comores. Ce match m’a confirmé que nous avons une équipe vraiment redoutable et qu’il fallait tout faire pour qu’elle se qualifie à la CAN. C’est pourquoi je n’ai pas hésité une seule seconde à m’investir entièrement dans ce pari fou avec tout ce que cela impliquait. A commencer par l’utilisation de mes fonds propres pour assurer le budget : les billets d’avion, l’hébergement, la restauration et même le salaire des baby-sitters afin que certains joueurs puissent venir en sélection. Et j’ai pu compter sur l’aide des partenaires lors des matchs contre le Togo et le Kosovo".

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Lova Ramisamanana et Nicolas Dupuis.

Ima Faneva et Nicolas Dupuis ont également mis les mains à la poche. Selon Ima Faneva, "pour les qualifications de cette CAN 2019, on joue au Soudan (9 juin 2017, 3- 1). On n’avait pas de maillots d’entraînement, ce qui n’est pas grave. Mais le jour du match, ils étaient différents! Après notre victoire, j’ai appelé la Fédé: “On ne peut pas jouer avec des maillots ou des shorts différents, des chaussettes trouées !” J’ai eu l’idée de vendre des maillots pour récolter des fonds. J’ai trouvé un magasin en Autriche qui les fait pour 29€ la pièce avec le flocage. J’en ai vendu 1 000 en France à 40€, donc on a récupéré plus de 10 000€. Et grâce à ça et d’autres sponsors ou des cagnottes, j’ai pu acheter survêtements, chaussettes, maillots, K- Way, sacs à dos… J’avais même pensé organiser un concert à Paris ".

La Fédé se méfie un peu de ce joueur qui se mêle de tout au lieu de jouer à la baballe comme les autres. Et grande gueule avec ça. "On voulait avoir le minimum, un petit hôtel correct, une bonne bouffe et un minimum d’équipements", disait-il avant de révéler : " la Fédération était venue avec des accompagnateurs et leur donnait 400€ à chacun. Et à nous? Rien".

C'est ainsi qu'en octobre 2018, certaines personnes à la Fédération ont exprimé le souhait de voir partir Faneva Ima, Nicolas Dupuis et l'association Alefa Barea si l'équipe  perd ou fait un match nul en Guinée équatoriale. Les Barea gagnent (1- 0) et l'aventure pouvait continuer ! Faneva Ima est un habitué de tels ostracismes. "Certaines personnes nous ont menacé de ne pas envoyer notre fils jouer à l’étranger", témoigne sa mère en racontant ses débuts.

Premier qualifié pour la CAN 2019, premier de son groupe devant des géants comme la Nigéria et la Guinée, les Bares ne s'inclineront qu'en  quart. Une épopée qui a valu à l'équipe d'être accueilli en héros à leur retour au pays.

Lova Ramisamanana résume ainsi ce parcours épique des Barea : "malgré les difficultés rencontrées... je suis très fier d’avoir contribué à cette réussite. Mais ma contribution est minime par rapport aux sacrifices des joueurs, qui percevaient une prime de présence de 100€ par rassemblement là où les plus modestes sélections percevaient 200€/jour de présence par de la part de leur Fédération. Malgré tout, ils ne se sont jamais plaint car ils jouent pour l’honneur du pays. Je me souviens même avoir promis 2 seaux de KFC comme prime de victoire contre l’Ouganda, mais rien que ça nous avait rendu heureux".

Quid de l'avenir ? Nicolas Dupuis demeure philosophe : "aujourd'hui l'équipe nationale est l'arbre qui cache la forêt. Si on ne se remet pas au travail (à la Fédération), alors dans deux ans il n'y aura plus d'équipe, dans quatre ans encore moins... Mon rôle est de tirer la sonnette d'alarme et dire aux responsables, attention il y a beaucoup de choses à changer à Madagascar".

Randy D.

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La maison natale de Pascal Bapasy Razakanantenaina à Majunga témoigne du conte de fée Barea.

19/03/2019

Démocratie et liberté de la presse

Paru dans le numéro 002 "Demokrasia", le magazine du Haut Conseil pour la Défense de la Démocratie et de l'Etat de Droit (HCDDEMadagascar, HCDDED, Demokrasia, Randy DonnyD).

L’information et la communication ne doivent être réduits à la seule dimension commerciale. L’espace de l’information et de la communication doit être organisé de manière à permettre l’exercice des droits et de la démocratie.

Madagascar, HCDDED, Demokrasia, Randy Donny

Qui possède, donc contrôle,  quoi dans l’espace de l’information et de la communication à Madagascar ?

La liberté de la presse est l'un des principes fondamentaux des systèmes démocratiques qui repose sur la liberté d'opinion et la liberté d'expression.

L’espace de l’information et de la communication doit être organisé de manière à permettre l’exercice des droits et de la démocratie. Il doit préserver et renforcer nos capacités à affronter les défis de notre temps, à anticiper notre destin commun et à rendre possible un développement durable prenant en compte les droits et intérêts des générations futures.

L’information fiable est une condition de l’exercice de la liberté d’opinion, du respect des droits humains en général et des processus démocratiques, notamment la délibération, l’élection, la prise de décision et la redevabilité. L’intégrité du processus démocratique est atteinte quand des informations susceptibles de l’influencer sont manipulées.

C'est pour toutes ces raisons qu'une Déclaration internationale sur l’information et la démocratie a été publié lundi 5 novembre 2018, soit soixante-dix ans après l’adoption à Paris de la Déclaration universelle des droits de l’Homme. Elle a été rédigée pendant deux mois par une Commission présidée par Christophe Deloire, secrétaire général de Reporters sans frontières (RSF), et Shirin Ebadi, lauréate du prix Nobel de la Paix. La Commission était composée de 25 personnalités de 18 nationalités, parmi lesquels les lauréats du Nobel Amartya Sen, Joseph Stiglitz et Mario Vargas Llosa, la lauréate du prix Sakharov, Hauwa Ibrahim, et également de spécialistes des nouvelles technologies, d’anciens dirigeants d’organisations internationales, de juristes et journalistes dont Abdou Diouf et Francis Fukuyama.

Ce texte de six pages précise les garanties démocratiques pour la liberté, l’indépendance, le pluralisme et la fiabilité de l’information, dans un contexte de mondialisation, de digitalisation et de bouleversement de l’espace public. Il a déjà le soutien de 12 chefs d’État et de gouvernement (Emmanuel Macron - France, Justin Trudeau - Canada, Macky Sall - Sénégal, Beji Caid Essebsi - Tunisie, Carlos Alvarado - Costa Rica - Erna Solberg - Norvège, et Alain Berset - Suisse, entre autres). Les membres de la Commission lancent un appel pour que “ les dirigeants de bonne volonté de tous les continents se mobilisent en faveur des modèles démocratiques et d’un débat public ouvert dans lequel les citoyens peuvent prendre leurs décisions sur la base de faits. L’espace global de la communication et de l’information, qui est un bien commun de l’humanité, doit être protégé en tant que tel, afin de favoriser l’exercice de la liberté d’expression et d’opinion en respectant les principes de pluralisme, de liberté, dignité et tolérance.

Selon Christophe Deloire, “ la démocratie connaît une crise profonde qui est aussi une crise systémique de l’espace public : (...) rumeurs, désinformation érigée en modèle, affaiblissement du journalisme de qualité, violence parfois extrême contre les reporters… Au-delà de ces phénomènes, il est de notre responsabilité de considérer les causes structurelles et de prendre les mesures appropriées (...) car les démocraties, ouvertes, subissent de plein fouet ces bouleversements, tandis que les régimes despotiques en tirent profit”.

L’espace de l’information et de la communication doit garantir la liberté, l’indépendance et le pluralisme de l’information. Ce bien commun a une valeur sociale, culturelle et démocratique. A ce titre, il ne saurait être réduit à sa seule dimension commerciale.

Le contrôle politique sur les médias, l'assujettissement de l’information à des intérêts particuliers, l’influence croissante d’acteurs privés qui échappent au contrôle démocratique, la désinformation massive en ligne, la violence contre les reporters et l’affaiblissement du journalisme de qualité, menacent l’exercice du droit à la connaissance. Toute tentative de limiter abusivement cet exercice, par la force, la technologie ou le droit, est une violation du droit à la liberté d’opinion.

Les journalistes agissent en complète indépendance à l’égard de tous les pouvoirs comme de toutes influences abusives, politiques, économiques, religieuses ou autres. Toute atteinte aux principes d’indépendance, de pluralisme et d’honnêteté de l’information, de la part d’autorités publiques, de propriétaires ou d’actionnaires, d’annonceurs ou de partenaires commerciaux de médias, est une atteinte à la liberté de l’information.

La fonction sociale du journalisme est d’assurer un rôle de “tiers de confiance” des sociétés et des individus. Elle crée les conditions de l’équilibre des pouvoirs et rend possible la pleine participation des individus à la société. Elle a pour but de rendre compte de la réalité, de la révéler de la façon la plus large, la plus profonde et la plus pertinente possible pour favoriser l’exercice du droit à la liberté d’opinion.

Madagascar occupe la 54e place sur 180 pays dans le Classement mondial de la liberté de la presse publié par RSF en 2018.